Officiellement rattachées à l’Australie, ces îles se retrouvent pourtant soumises à 10 % de taxes à l’importation par les États-Unis. De quoi interroger les diplomates, les économistes et, bien sûr, les internautes qui n’ont pas tardé à s’amuser de l’absurdité de la situation.
Les îles Heard et McDonald, un décor sans humains
Situées à environ 1 700 kilomètres de l’Antarctique, les îles Heard et McDonald font partie des territoires les plus isolés de la planète. Aucun habitant permanent, aucune activité industrielle, seulement des expéditions scientifiques très rares, et des plages recouvertes de glace et de faune polaire.
L’UNESCO décrit ces îles comme l’un des derniers écosystèmes vierges de la planète. Aucun bâtiment, aucune route, aucune trace de pollution humaine durable. Pour s’y rendre, il faut embarquer sur un navire et affronter deux semaines de navigation depuis Perth. Pourtant, ces terres gelées figurent noir sur blanc sur les documents officiels américains liés à la hausse des droits de douane.
Des échanges commerciaux fantômes
Selon les statistiques de la Banque mondiale, les États-Unis auraient importé pour environ 1,4 million de dollars de marchandises provenant de ces îles en 2022. La majorité serait composée de « machines et appareils électriques ». Une donnée qui laisse perplexe : aucune usine, aucun entrepôt ne s’y trouve. Difficile donc de comprendre d’où proviennent ces produits, à moins qu’il ne s’agisse d’une erreur statistique ou d’un transit administratif.
Même le gouvernement australien s’interroge. Officiellement, les îles Heard et McDonald ne produisent rien d’exportable vers les États-Unis. Leur rôle est uniquement scientifique et environnemental. Le Premier ministre australien Anthony Albanese n’a pas hésité à ironiser sur le sujet, soulignant qu’« aucun endroit sur Terre n’est à l’abri » de la guerre commerciale déclenchée par Trump.
L’île Norfolk et ses 29 % de taxes
Dans la liste des territoires ciblés, on retrouve aussi l’île Norfolk, rattachée elle aussi à l’Australie. Elle compte environ 2 000 habitants, une économie basée principalement sur le tourisme et aucune exportation majeure vers les États-Unis. Malgré cela, les droits de douane y grimpent jusqu’à 29 %, bien au-dessus des 10 % imposés au reste du pays.
George Plant, l’administrateur de l’île, a confirmé qu’aucune marchandise connue ne quitte l’île pour l’Amérique. Mais cela n’a pas empêché la Maison Blanche de classer ce petit bout de terre comme un acteur du commerce mondial.
Taxer les territoires vides : une stratégie à double tranchant
En visant des régions inhabitées comme les îles Heard et McDonald, Trump semble avoir voulu démontrer sa volonté de frapper partout. Mais cette logique de taxation automatique, qui ne fait pas la différence entre un pays industrialisé et un territoire glacé sans vie humaine, pose des questions.
À quoi bon imposer des droits de douane à un endroit qui ne vend rien et où personne ne vit ? Pourquoi risquer des tensions diplomatiques avec des alliés en taxant leurs territoires extérieurs sans réelle justification économique ? La réponse reste floue, mais elle alimente les critiques sur le manque de cohérence de cette politique commerciale globale.
Des conséquences inattendues pour les militaires
Parmi les autres anomalies repérées, il y a aussi le cas des îles Chagos. Officiellement territoire britannique, elles abritent une base militaire commune avec les États-Unis : Diego Garcia. Or, elles aussi font partie des zones soumises à la nouvelle vague de droits de douane. En clair, les militaires américains en poste pourraient, théoriquement, être concernés par les mesures de leur propre gouvernement.
Oliver Cooper, élu conservateur britannique, a résumé la situation en une phrase sarcastique sur X : « Est-ce que quelqu’un peut prévenir Trump qu’il taxe sa propre base militaire ? ».
Quand la diplomatie devient géographique
Dans cette nouvelle offensive économique, la logique de Donald Trump semble privilégier le volume à la pertinence. Plutôt que cibler les véritables concurrents des États-Unis, la Maison Blanche a étendu sa toile jusqu’aux confins inhabités de la planète. Une manière de montrer ses muscles, certes, mais qui prête plus à rire qu’à convaincre.
La guerre commerciale de Trump a peut-être atteint son pic d’absurdité : quand des manchots royaux deviennent, malgré eux, victimes collatérales d’une politique économique globale.
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