Le Salvador relance l’extraction d’or de ses mines

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En 2017, le Salvador devenait le premier pays au monde à interdire l’exploitation minière des métaux, citant les dangers environnementaux et sanitaires liés à l’utilisation de produits chimiques comme le cyanure et le mercure. Cette décision, soutenue par une large coalition comprenant l’Église catholique, visait à protéger les ressources en eau et les écosystèmes du pays. À l’époque, bien que des réserves d’or et d’argent aient été identifiées, aucune exploitation minière à grande échelle n’était en cours.

Cependant, le président Nayib Bukele, récemment réélu, a annoncé vouloir revenir sur cette interdiction. Selon lui, les richesses inexploitées de ces mines pourraient transformer l’économie du Salvador, qui connaît une croissance modérée et une dépendance importante aux envois de fonds de l’étranger.

Des réserves aurifères prometteuses selon Bukele

Le président Bukele a affirmé sur les réseaux sociaux que le Salvador pourrait détenir les plus grandes réserves d’or par kilomètre carré au monde. Selon une étude non publiée qu’il cite, exploiter seulement 4 % de ces réserves générerait 131 milliards de dollars, soit 380 % du PIB du pays. Ces chiffres spectaculaires suscitent autant d’espoir que de scepticisme parmi les experts.

Bukele propose une exploitation minière qu’il qualifie de « moderne et durable », assurant qu’il est possible de tirer parti de ces ressources tout en respectant l’environnement. Cependant, cette vision optimiste est fortement critiquée par les défenseurs de l’environnement, qui rappellent les dangers inhérents à l’exploitation minière.

Avec 27 % de sa population vivant sous le seuil de pauvreté et 70 % des travailleurs dans le secteur informel, le Salvador est confronté à d’importants défis économiques. Après avoir misé sur le bitcoin comme monnaie légale en 2021, une initiative qui a rencontré des résultats mitigés, Bukele semble désormais tourner son attention vers l’exploitation minière comme solution pour stimuler l’économie.

Selon Carlos Acevedo, ancien président de la Banque centrale du Salvador, les réserves aurifères pourraient potentiellement rembourser plusieurs fois la dette extérieure du pays, qui représente 85 % de son PIB. Cependant, il insiste sur le fait qu’il n’existe pas de solution miracle pour générer une croissance économique instantanée. Le véritable impact dépendra des redevances versées par les compagnies minières et de la manière dont ces revenus seront utilisés.

Opposition des environnementalistes

L’annonce de Bukele a suscité une vive opposition de la part des organisations environnementales. Selon elles, l’exploitation minière représente une menace majeure pour les ressources en eau et la santé publique. Par exemple, le fleuve Lempa, qui fournit de l’eau potable à San Salvador, pourrait être contaminé par des métaux lourds et des produits chimiques utilisés dans les procédés miniers.

Amalia López, membre de l’Alliance contre la privatisation de l’eau, affirme que l’exploitation minière, même « moderne », entraîne des conséquences graves, comme des maladies rénales, respiratoires et des cas de leucémie. Ces impacts ne sont pas toujours immédiats, mais leurs effets à long terme sur les communautés locales peuvent être dévastateurs.

Dans des régions comme Chalatenango, où un projet minier a été bloqué en 2006 grâce à la mobilisation des habitants, la crainte de voir réapparaître des initiatives similaires est palpable. Les souvenirs de pollution, notamment dans des zones comme Santa Rosa de Lima, rappellent les dangers liés à ces activités.

Perspectives d’emploi et de développement local

Dans certaines communautés, les avis sur la relance de l’exploitation minière sont partagés. Si certains, comme Ruben Delgado, un ouvrier du bâtiment, voient dans ce projet une opportunité de création d’emplois et de prospérité économique, d’autres, comme Jose Torres, un mineur artisanal, craignent que les grandes entreprises minières ne mettent fin à leurs moyens de subsistance traditionnels.

Les impacts environnementaux de l’extraction industrielle restent une source majeure de préoccupation. Par exemple, la rivière San Sebastian, contaminée par une ancienne activité minière, témoigne encore aujourd’hui des conséquences néfastes de ces pratiques.

Le projet de relancer l’exploitation minière intervient alors que Bukele jouit d’un large soutien au sein du Congrès, où son parti détient une majorité confortable. Malgré cela, les critiques dénoncent un revirement opportuniste : lors de sa première campagne présidentielle en 2019, Bukele s’était positionné en faveur de l’interdiction des mines.

Avec une économie fragile et une population divisée sur les avantages et les risques de l’exploitation minière, le Salvador se trouve à un tournant décisif. Tandis que Bukele espère relancer la croissance grâce à cette initiative, les opposants rappellent que le pays pourrait payer un prix élevé en termes de santé publique et d’environnement.

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