Le nombre de dossiers CPF (Compte Personnel de Formation) semble se stabiliser, avec une progression modérée en 2024 par rapport à l’année précédente. En 2023, plus de 1,44 million de dossiers ont été validés, et selon les données récentes, le dispositif pourrait enregistrer des chiffres similaires cette année avec 1,09 million de dossiers validés à la date du 8 septembre 2024. Cette stabilisation semble être le résultat d’une série de mesures réglementaires mises en place pour réguler l’usage du CPF, un dispositif qui a connu un immense succès depuis son lancement.
Le CPF : un dispositif en maturité
Le CPF, lancé en 2015, a été conçu pour donner aux salariés la responsabilité de leur formation professionnelle, leur permettant ainsi de monter en compétences tout au long de leur carrière sans intervention directe de leur employeur. Après avoir connu des débuts fulgurants, le CPF a atteint un niveau de maturité en 2023, marqué par une utilisation plus réfléchie du dispositif, grâce notamment à une série de réformes visant à lutter contre la fraude et à mieux encadrer les formations éligibles.
Plusieurs mesures ont été mises en place en 2023 pour garantir une utilisation plus efficiente des fonds publics liés au CPF. Parmi celles-ci, la plus notable est l’instauration d’une participation forfaitaire de 100 euros, introduite en mai 2024. Cette contribution s’applique à tous les demandeurs, sauf pour les chômeurs, et vise à responsabiliser les usagers, encourageant ainsi des choix de formation plus stratégiques et orientés vers l’emploi. Par ailleurs, le financement du permis de conduire a été restreint pour certains types de véhicules, réduisant ainsi les abus qui concernaient des demandes de permis pour des véhicules plus exotiques comme les grosses motos.
Malgré cette régulation accrue, les chiffres montrent un léger recul dans certaines catégories de bénéficiaires. En 2024, la proportion des personnes sans diplôme utilisant le CPF est passée de 21 % en 2022 à 16 %. De plus, la part des non-cadres est également en baisse, passant de 85 % à 80 %. Ce phénomène pourrait être attribué à l’effet dissuasif de la participation financière obligatoire. Certaines populations, notamment les travailleurs à faible revenu ou les salariés modestes, peuvent être plus réticents à engager ces dépenses.
Un des objectifs principaux de ces réformes est de préserver les finances publiques. Le CPF, avec son succès rapide et massif, avait vu ses coûts exploser, atteignant plus de 2 milliards d’euros en 2023. Pour limiter cette envolée, l’État a opté pour une approche de régulation stricte, visant à freiner l’augmentation des dépenses. Comme l’indique Michel Barabel, expert en ressources humaines, « la volonté de l’État de réduire les coûts du CPF tout en assurant l’accès à la formation est un exercice d’équilibre délicat ». Il souligne que cette baisse pourrait atteindre 10 % en 2025, par rapport aux niveaux de 2023, en raison de cette nouvelle dynamique de gestion des coûts.
Si la loi de 2018 visait à démocratiser l’accès à la formation continue, ces nouvelles mesures, bien qu’efficaces pour contenir les coûts, pourraient freiner cet élan. Le forfait de 100 euros, bien que modeste, peut représenter une somme conséquente pour certains salariés à faibles revenus, notamment les smicards à temps partiel. Selon Barabel, cette mesure pourrait décourager ceux qui, ayant souvent un rapport compliqué avec la formation, hésitent déjà à s’engager dans des démarches de requalification ou de montée en compétences.
Malgré ces ajustements, le CPF reste un outil puissant pour accompagner les mutations du marché du travail et répondre aux besoins en compétences des entreprises. Le rapport annuel de la Caisse des Dépôts souligne d’ailleurs que le dispositif continue d’évoluer pour mieux s’adapter aux réalités économiques et sociales. Par exemple, des efforts sont en cours pour encourager les financements complémentaires, aussi bien publics que privés, permettant ainsi aux bénéficiaires d’accéder à des formations plus coûteuses.
En termes de prévisions, 2024 devrait voir une légère augmentation des dépenses liées au CPF, avec un budget projeté autour de 2,2 milliards d’euros, en hausse par rapport aux 2,02 milliards dépensés en 2023. Cette augmentation s’explique en partie par la hausse des coûts moyens des formations, mais aussi par une stabilité attendue dans le nombre de bénéficiaires du dispositif, estimé à 1,8 million.