Mohammed Chahbar, un homme de 63 ans, a été présenté ce 2 décembre devant la juge Sabine Khéris du pôle cold-case de Nanterre. Il est soupçonné de deux meurtres non élucidés survenus dans l’Isère, des affaires qui remontent respectivement à 1988 et 2000. Son arrestation marque un tournant dans l’enquête sur les « disparus de l’Isère », une série de cas qui intrigue les autorités depuis plusieurs décennies.
Deux meurtres, deux époques
Les accusations portent sur le meurtre de Nathalie Boyer, une adolescente de 15 ans retrouvée égorgée en août 1988 à Saint-Quentin-Fallavier, et celui de Laïla Afif, une quadragénaire découverte en mai 2000 dans le canal de la Bourbe, à La Verpillière, tuée par balle. Ces deux affaires avaient suscité une vive émotion à l’époque mais étaient restées sans dénouement.
Mohammed Chahbar, arrêté à Dijon, est désormais au cœur des investigations. Il aurait été en contact avec les deux victimes, et plusieurs éléments matériels ainsi que des témoignages semblent le relier aux scènes de crime.
Des preuves accablantes
Les enquêteurs ont établi que Mohammed Chahbar possédait une Citroën BX blanche, un véhicule signalé à plusieurs reprises près des lieux du crime de Laïla Afif. Ce détail crucial a été corroboré par des témoins de l’époque. De plus, il résidait dans le même quartier que Nathalie Boyer en 1988 et avait attiré l’attention de voisins pour des comportements jugés inquiétants.
Des témoignages évoquent également sa présence régulière à la gare de La Verpillière, où il aurait été observé en train de suivre des femmes, alimentant les soupçons sur ses agissements.
Avant son arrestation, Mohammed Chahbar menait une existence apparemment tranquille à Dijon. Retraité, il vivait avec sa compagne dans le quartier des Grésilles. Cette vie paisible a pris fin lorsque la Section de recherches de Grenoble, mandatée par le pôle crimes sériels de Nanterre, l’a interpellé la semaine dernière sur commission rogatoire. Cette intervention a pris de court ses voisins, dont certains ont exprimé leur choc face aux accusations.
Le pôle cold-case de Nanterre, créé pour élucider des affaires non résolues, joue un rôle central dans cette avancée. Sous la direction de la juge Sabine Khéris, les enquêteurs ont rassemblé des éléments qui permettent aujourd’hui de relancer ces affaires. Mohammed Chahbar a été placé en garde à vue prolongée, un interrogatoire de 96 heures ayant permis de confronter le suspect à des preuves accumulées au fil des années.
Ces deux meurtres s’inscrivent dans le cadre plus large des disparus de l’Isère, une série d’affaires impliquant des enfants, adolescents et adultes portés disparus ou assassinés dans cette région depuis les années 1980. Ce dossier a suscité un intérêt national en raison de sa complexité et de l’absence de réponses pendant plusieurs décennies.
Dans le quartier des Grésilles, les voisins de Mohammed Chahbar ont exprimé leur stupeur. « Je ne peux pas croire qu’il ait pu faire une chose pareille », a déclaré un habitant, tandis qu’un autre évoquait une « double vie » possible du suspect.
Pour les familles des victimes, cette arrestation pourrait enfin apporter des réponses et une forme de justice après des années d’attente et d’incertitude. Toutefois, l’enquête reste en cours, et les autorités devront prouver la culpabilité de Mohammed Chahbar au-delà de tout doute raisonnable.