L’âge légal du mariage reste fixé à 18 ans, mais la réforme propose de limiter les dérogations. Actuellement possibles dès l’âge de 15 ans, ces dernières ne seraient désormais autorisées qu’à partir de 17 ans et sous des conditions strictes validées par un juge. Cette mesure vise à réduire les mariages précoces, une pratique critiquée pour ses impacts négatifs sur l’éducation et la santé des jeunes filles.
- La polygamie sous conditions renforcées : concernant la polygamie, le projet maintient son autorisation, mais avec des restrictions supplémentaires. Les réformes proposent que les épouses puissent inscrire une clause dans le contrat de mariage interdisant à leur mari de prendre une seconde épouse. En l’absence de cette clause, la polygamie resterait possible, mais uniquement dans des situations précises, telles que l’infertilité ou une maladie grave de la première épouse, et sous réserve de l’autorisation du juge.
- Tutelle des enfants : un partage entre les parents : l’un des changements les plus significatifs concerne la tutelle des enfants. Jusqu’à présent, cette responsabilité était attribuée exclusivement au père. Désormais, la réforme prévoit une tutelle partagée entre les deux époux, même après un divorce. En outre, une mère remariée ne perdrait plus automatiquement la garde de ses enfants. Cette mesure marque une avancée vers une égalité parentale, bien que son application pratique reste floue.
- Héritage : des ajustements limité : le système d’héritage, où les femmes reçoivent la moitié de la part des hommes, reste inchangé dans ses principes fondamentaux. Cependant, une alternative a été introduite pour permettre des donations sans restrictions, y compris aux héritières mineures. Si cette mesure offre une certaine souplesse, elle ne répond pas à l’exigence d’égalité totale en matière de succession, réclamée par de nombreuses associations.
Un processus de réforme guidé par le roi Mohammed VI
La réforme du Code de la famille a été initiée par le roi Mohammed VI en 2022. Après six mois de travaux, un comité spécial a soumis ses recommandations au souverain en mars 2024. Ces propositions ont ensuite été transmises au Conseil supérieur des oulémas, organe chargé d’émettre des avis religieux, pour validation. Ce double cadre, mêlant modernisation et respect des préceptes religieux, illustre l’équilibre délicat que cherche à maintenir le Maroc.
Malgré les avancées proposées, les mouvements féministes restent sceptiques. Ils dénoncent notamment le maintien de certaines pratiques jugées archaïques, comme la polygamie ou l’inégalité dans l’héritage. Ghizlane Mamouni, avocate et militante, regrette que ces réformes ne s’attaquent pas aux racines des inégalités. Selon elle, les propositions actuelles tentent de concilier des référentiels religieux et universels, sans véritablement opérer de transformation profonde.
Le projet de réforme du Code de la famille reflète les tensions entre tradition et modernité au Maroc. Bien qu’il s’agisse d’un pas vers une plus grande égalité, ces changements devront être validés par le Parlement et traduits en textes de loi. Le débat s’annonce houleux, avec des attentes élevées de la société civile et des résistances potentielles au sein des institutions.