Études

8 étudiants infirmiers sur 10 ont envisagé d’abandonner leurs études

Depuis plusieurs années, les conditions de vie et d’étude des étudiants en soins infirmiers (ESI) sont au cœur des préoccupations. Malgré les initiatives visant à soutenir ces futurs soignants, les chiffres ne cessent de révéler une réalité alarmante : 8 étudiants infirmiers sur 10 ont envisagé d’abandonner leurs études. Une enquête nationale menée par l’association SPS (Soins aux Professionnels de Santé) et la plateforme “Réussis ton IFSI” met en lumière des chiffres et des témoignages poignants.


Une désillusion dès la première année

Si 81 % des étudiants choisissent cette voie par vocation, notamment pour “aider les autres”, les désillusions sont nombreuses. Dès la première année, ils sont confrontés à plusieurs difficultés majeures :

  • 63 % signalent des difficultés professionnelles, particulièrement lors des stages. Les encadrants sont souvent décrits comme peu impliqués ou même hostiles : “Les étudiants sont pris pour des larbins”, déclare un étudiant.
  • 57 % évoquent des difficultés institutionnelles, liées à une organisation des cours jugée trop dense et insupportable.
  • 33 % citent des difficultés personnelles, englobant des problèmes de santé, des contraintes familiales ou des soucis financiers.
  • Seulement 9 % déclarent ne rencontrer aucune difficulté.

Le résultat ? 77 % des étudiants ont envisagé d’abandonner leur cursus, un chiffre en hausse par rapport à 2022 (59,2 %). Si le taux d’abandon effectif reste plus faible (10 % en première année, 14 % sur l’ensemble du parcours), l’intention d’abandon est un indicateur préoccupant.

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Une situation encore plus critique pour les étudiants en situation de handicap

Parmi les répondants, 12 % se déclarent en situation de handicap, et parmi eux, 82 % envisagent de quitter leur formation. La majorité estime que les aménagements mis en place sont insuffisants, accentuant leur isolement.


Une dégradation alarmante de la santé physique et mentale

Des habitudes de vie préoccupantes

L’enquête révèle que la santé physique des ESI se détériore au fil des années :

  • 21 % considèrent leur santé comme mauvaise ou très mauvaise.
  • 48 % dorment moins de 6 heures par nuit, bien en deçà des recommandations de 7 à 9 heures.
  • 44 % jugent leur alimentation moyenne, tandis que 22 % déclarent ne pas manger à leur faim, souvent à cause de contraintes financières ou d’horaires incompatibles avec une alimentation équilibrée.

Les défis financiers

La précarité financière est un problème récurrent :

  • 65 % des étudiants déclarent avoir des difficultés financières.
  • Avec des indemnités de stage s’élevant à seulement 1 euro de l’heure en première année, 72 % des étudiants travaillent en parallèle de leurs études, contre 58 % en 2022.

Une santé mentale en péril

La santé mentale des étudiants est gravement impactée :

  • 27 % des ESI ont eu des pensées suicidaires au cours de leur formation, un chiffre en forte augmentation par rapport à 2017 (7,4 %).
  • Parmi ceux ayant eu ces pensées, 81 % ont subi des violences, principalement psychologiques (39 %), mais aussi physiques ou sexistes.

Ces violences, souvent banalisées, se déroulent fréquemment lors des stages, exacerbant le mal-être des étudiants. 61 % des répondants ne savent pas où trouver une aide psychologique, accentuant leur isolement.


Un soutien insuffisant des établissements

Face à ces constats, les étudiants se tournent principalement vers leur famille (85 %) et leurs amis (76 %) pour obtenir du soutien. Seuls 0,7 % des répondants déclarent utiliser les services de soutien proposés par leur établissement.

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Les pistes d’amélioration proposées

Pour répondre à ces enjeux, les associations à l’origine de l’enquête appellent à des actions concrètes :

  1. Soutien psychologique accru :

    • Mise en place de consultations gratuites et anonymes, comme la plateforme téléphonique 0 805 23 23 36, disponible 24h/24.
    • Ateliers de gestion du stress et groupes de parole pour libérer la parole et réduire l’isolement.
  2. Aides financières renforcées :

    • Accès facilité aux bourses et autres soutiens financiers.
    • Organisation de forums pour partager des astuces économiques et des bons plans.
  3. Amélioration des conditions de stage :

    • Formation des encadrants pour offrir un accompagnement respectueux et bienveillant.
    • Introduction de mentorat pour soutenir les étudiants sur le terrain.
  4. Promouvoir la santé globale des étudiants :

    • Ateliers sur la gestion du sommeil et l’alimentation.
    • Encouragement à la pratique d’activités physiques adaptées.

Le parcours des étudiants en soins infirmiers reflète les tensions d’un système de santé en crise. Malgré les difficultés, 75 % des étudiants déclarent être satisfaits de leur choix de formation, témoignant d’un fort attachement à leur vocation. Cependant, il est impératif d’agir pour améliorer leurs conditions de vie et de travail afin de leur permettre d’exercer dans de bonnes conditions et, surtout, de préserver leur santé.