La récente nomination d’Anne Genetet, députée des Français à l’étranger, au poste de ministre de l’Éducation nationale a suscité une vive opposition au sein des syndicats enseignants. Inconnue du grand public et sans expérience directe dans le domaine de l’éducation, cette décision du gouvernement Barnier a pris de nombreux observateurs par surprise. L’annonce a immédiatement provoqué des réactions virulentes, notamment de la part des syndicats du secteur éducatif, qui considèrent ce choix comme une « erreur de casting ».
Anne Genetet, âgée de 61 ans, a une carrière principalement tournée vers la médecine, le journalisme médical, et les affaires étrangères. Après des études en médecine et une expérience de courte durée dans le secteur de la santé, elle a travaillé comme consultante en communication et en risques sanitaires. Installée à Singapour depuis 2005, elle a ensuite fondé une agence de conseil pour les expatriés. Ce parcours diversifié ne convainc toutefois pas les syndicats, qui estiment que sa méconnaissance des problématiques éducatives en fait une candidate peu adaptée à la gestion du système scolaire français.
La secrétaire générale du SNES-FSU, Sophie Vénétitay, a ainsi qualifié cette nomination de « mauvais choix », reprochant à Anne Genetet de n’avoir aucun lien direct avec les enjeux de l’éducation nationale. Elle a notamment souligné que son expérience dans la gestion des employés de maison à Singapour ne l’a pas préparée aux défis complexes de l’éducation publique en France. De plus, Guislaine David, porte-parole du SNUipp-FSU, a exprimé sa colère face à cette nomination, dénonçant une continuité de la politique menée par Gabriel Attal, qualifiée de « destructrice » par les syndicats.
Lors de sa prise de fonctions, Anne Genetet a insisté sur la « stabilité » qu’elle souhaite apporter, affirmant que le ministère ne changera pas de cap. Elle a également évoqué son désir de poursuivre les réformes initiées par Gabriel Attal, notamment en ce qui concerne les groupes de niveaux et la formation initiale des enseignants. Ces annonces inquiètent les syndicats, qui voient dans cette continuité un risque de perpétuer des réformes impopulaires.
Pour le SUD-Éducation, cette nomination n’est rien d’autre qu’une provocation, d’autant plus que les discussions sur le budget de l’Éducation nationale vont bientôt débuter à l’Assemblée nationale. Le syndicat s’interroge sur le poids réel que pourra avoir Anne Genetet dans les négociations budgétaires, particulièrement dans un contexte de crise de l’attractivité des métiers de l’enseignement. Le Snes a également soulevé des inquiétudes quant à la création d’un ministère de l’Enseignement professionnel, ce qui pourrait accentuer la division entre les différentes branches de l’éducation.
La nomination d’Anne Genetet est perçue par beaucoup comme une décision purement politique, destinée à maintenir un équilibre au sein du gouvernement. Plusieurs figures politiques, dont Paul Marion, président de l’association Les amis de Samuel Paty, ont également exprimé leur perplexité face à ce choix. Marion, qui a longtemps milité pour la mémoire de Samuel Paty dans le domaine éducatif, a regretté que le ministère de l’Éducation soit encore une fois confié à une personnalité sans lien direct avec le secteur.
Pour certains observateurs, cette situation rappelle la nomination d’Amélie Oudéa-Castéra au ministère des Sports, un autre choix jugé peu adapté en raison de son manque d’expérience dans le domaine. Les syndicats craignent que la gestion de l’Éducation nationale par une ministre non issue de ce milieu ne conduise à une déconnexion croissante entre le gouvernement et le personnel enseignant, alors que les enseignants demandent davantage de moyens pour faire face à des classes surchargées et à des conditions de travail de plus en plus difficiles.
Anne Genetet aura fort à faire pour convaincre les syndicats et les enseignants de sa capacité à mener à bien les réformes nécessaires. La crise de l’attractivité des métiers de l’éducation, les tensions budgétaires, et la restructuration de la formation des enseignants figurent parmi les principaux défis qu’elle devra relever dans les mois à venir. Dès son arrivée au ministère, la nouvelle ministre devra affronter une première épreuve : une grève des enseignants est déjà prévue pour le 1er octobre 2024, afin de réclamer plus de moyens pour l’éducation et la défense des services publics.
Face à ces enjeux, la question demeure : Anne Genetet parviendra-t-elle à s’imposer comme une ministre capable de rassembler, ou son mandat sera-t-il marqué par une confrontation continue avec les syndicats ? Pour l’heure, la défiance semble l’emporter, et les premières décisions qu’elle prendra seront scrutées de près par la communauté éducative.