Malgré cette mise en examen prononcée le 28 mars, Sydney Ohana n’est pas suspendu d’activité, à la surprise de beaucoup. Il est pourtant soumis à un contrôle judiciaire, avec plusieurs obligations : remise de son passeport, interdiction de quitter le territoire, et interdiction d’entrer en contact avec les plaignantes.
Dans la petite rue privée où se trouve la clinique Eiffel-Carré d’Or, rien ne semble avoir changé. Des clientes, souvent fraîchement opérées, continuent d’affluer. L’activité est normale, les consultations s’enchaînent, et le docteur Ohana est toujours présent. Selon son entourage, il serait « serein » face à la procédure en cours. Ce calme apparent tranche avec la gravité des accusations portées contre lui.
Des faits qui s’étalent sur plusieurs années
Les plaintes déposées concernent des faits allant de 2017 à 2023. La première remonte à plusieurs viols présumés en 2017, commis à la fois dans sa clinique et à son domicile. La patiente dit avoir été agressée sexuellement à trois reprises.
Une seconde plaignante, issue du milieu médical, l’accuse d’avoir eu des comportements obscènes et déplacés lors d’un congrès en septembre 2023. Elle rapporte notamment que le chirurgien aurait tenté d’exhiber ses parties génitales devant elle.
La troisième femme évoque une agression sexuelle au sein même de la clinique, juste après une intervention chirurgicale. Elle affirme que le médecin aurait touché sa poitrine sans consentement.
Sydney Ohana n’est pas un inconnu. Il a été invité à plusieurs reprises dans des émissions télé, dont Touche pas à mon poste. Sur les réseaux, il rassemble une communauté de plus de 30 000 abonnés sur YouTube, où il partage ses interventions et ses réflexions sur la chirurgie esthétique.
Son image publique et sa notoriété dans les cercles VIP contrastent fortement avec les témoignages des plaignantes, qui décrivent un praticien abusant de son pouvoir et de sa notoriété.
Selon des sources proches de l’enquête, des vidéos non datées montreraient Sydney Ohana dans des situations ambiguës, parfois en présence de jeunes femmes dansant devant lui. L’une d’elles le montre torse nu, avec des bougies-fontaines en main, dans un décor qui ressemble plus à une soirée privée qu’à une structure médicale.
Ces éléments ne constituent pas à eux seuls des preuves, mais ils renforcent le sentiment d’impunité ressenti par certains observateurs du monde médical.
Ce n’est pas la première fois que le Conseil de l’ordre des médecins recadre le chirurgien. En 2016, il avait été averti pour avoir envoyé une carte de vœux à ses anciens patients, avec un ton jugé trop promotionnel. On lui reprochait d’avoir utilisé des termes comme « cadre prestigieux » ou « technologie de pointe », ce qui contrevient aux règles de déontologie.
En 2022, un second avertissement tombe. Cette fois, ce sont des promesses publicitaires concernant des implants capillaires à « prix de Turquie » et des offres limitées qui lui sont reprochées. Des pratiques assimilées à de la publicité commerciale, ce qui est strictement interdit dans le milieu médical.
Sydney Ohana est aussi un fervent opposant à la TVA de 20% appliquée à la chirurgie esthétique sans visée thérapeutique. Il estime que cette taxation fragilise l’ensemble de son secteur, d’autant plus que les Jeux olympiques à Paris ont freiné l’activité de sa clinique, située dans une zone à accès restreint. Il évoque une baisse importante de revenus en 2024.
Malgré les plaintes déposées, les témoignages et une mise en examen officielle, le chirurgien continue à recevoir ses patients. La procédure suit son cours, mais aucune interdiction stricte d’exercer ne semble avoir été appliquée à ce stade, ce qui interroge sur les failles possibles du système disciplinaire et judiciaire.
Lire aussi : un chirurgien opère un patient en Chine depuis Bordeaux