L’UNESCO, en tant qu’organisation internationale dédiée à l’éducation, à la science et à la culture, a sonné l’alarme sur cette situation sans précédent. Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO, a rappelé que l’Afghanistan est désormais le seul pays au monde où l’éducation des filles au-delà de l’âge de 12 ans est strictement interdite. Elle a appelé la communauté internationale à se mobiliser pour rétablir le droit fondamental à l’éducation pour toutes les filles et les femmes afghanes, un droit qui ne devrait jamais être négociable.
La situation est encore plus alarmante lorsque l’on considère les chiffres globaux : 2,5 millions de filles en Afghanistan, soit 80 % des filles en âge de fréquenter l’école, sont actuellement privées de leur droit à l’éducation. Ces données illustrent l’ampleur de la crise éducative qui frappe le pays, où l’interdiction de l’accès à l’enseignement secondaire a non seulement bloqué l’avenir de ces jeunes filles, mais a également impacté négativement l’ensemble du système éducatif.
L’impact de ces restrictions ne se limite pas seulement à l’enseignement secondaire. Même si les filles sont encore autorisées à fréquenter l’école primaire, le nombre d’élèves inscrits a chuté de manière drastique depuis 2021. Selon les nouvelles données de l’UNESCO, l’Afghanistan ne comptait plus que 5,7 millions d’élèves (filles et garçons) inscrits dans l’enseignement primaire en 2022, contre 6,8 millions en 2019. Cette baisse s’explique par plusieurs facteurs, dont l’interdiction faite aux enseignantes d’enseigner aux garçons, ce qui a aggravé la pénurie d’enseignants qualifiés. De plus, dans un contexte socio-économique de plus en plus difficile, de nombreux parents hésitent à envoyer leurs enfants à l’école, ce qui contribue à l’abandon scolaire massif.
Les conséquences de cette déscolarisation sont particulièrement préoccupantes. L’UNESCO a mis en garde contre une augmentation du travail des enfants et des mariages précoces, deux phénomènes directement liés à l’absence d’éducation. Par ailleurs, l’enseignement supérieur est également en crise, avec une chute de 53 % du nombre d’étudiants inscrits dans les universités depuis 2021. Cette diminution va sans doute entraîner une pénurie de compétences dans des secteurs cruciaux, aggravant les problèmes de développement socio-économique du pays à long terme.
Face à cette situation, l’UNESCO n’est pas restée les bras croisés. L’organisation a déployé des efforts significatifs pour développer des modes d’apprentissage alternatifs afin de continuer à offrir des opportunités éducatives aux filles et aux femmes afghanes, même dans des conditions aussi difficiles. Depuis 2021, des programmes éducatifs basés sur l’implication des communautés locales ont été mis en place dans 20 provinces du pays. Plus de 1 000 facilitateurs, dont 780 femmes, ont été formés pour dispenser des cours d’alphabétisation. Ces efforts ont déjà permis de toucher plus de 55 000 jeunes, principalement des filles, dans près de 1 900 villages.
L’UNESCO soutient également des initiatives dans les pays voisins comme le Pakistan, le Tadjikistan et l’Iran, où de nombreux réfugiés afghans ont trouvé refuge. Ces initiatives incluent des centres de formation pour les enseignants afghans, visant à garantir que l’éducation reste accessible même en exil.
En outre, l’UNESCO a investi dans l’enseignement à distance, en soutenant les médias afghans pour développer et diffuser des programmes éducatifs via la radio et la télévision. Par exemple, la Begum Organization for Women, basée à Paris, a fondé une radio en mars 2021 et une chaîne câblée en mars 2024, qui diffusent des contenus éducatifs destinés à une audience estimée à 17 millions d’Afghans.
Malgré ces efforts louables, l’UNESCO insiste sur le fait que rien ne peut remplacer l’éducation en présentiel dans une salle de classe. L’organisation appelle donc à une mobilisation internationale pour garantir un retour complet et inconditionnel à l’éducation pour toutes les filles et femmes en Afghanistan. L’avenir de toute une génération dépend de la réouverture des écoles et des universités, une nécessité absolue pour éviter que le pays ne s’enfonce davantage dans la crise.