Une augmentation significative des effectifs
Le rapport met en lumière la transformation de l’Éducation nationale pour accueillir les élèves en situation de handicap. Entre 2006 et 2022, les effectifs d’élèves handicapés ont triplé, passant de 155 000 à plus de 436 000. Cet effort d’inclusion s’est accompagné d’une hausse importante du nombre d’AESH, qui sont devenus le deuxième métier de l’Éducation nationale, avec 78 816 agents en équivalents temps plein en 2023, soit une augmentation de 90% depuis 2013.
Malgré cette augmentation, la Cour des comptes souligne des difficultés persistantes. Le recours aux AESH, bien que massif, est perçu comme une solution parfois privilégiée « au détriment des dispositifs d’accessibilité » qui restent insuffisamment développés. Cela inclut les supports pédagogiques adaptés et l’accessibilité des bâtiments. Les AESH, comme les enseignants, expriment un sentiment de ne pas être suffisamment formés ou outillés pour répondre aux besoins spécifiques des élèves qu’ils accompagnent. Les magistrats relèvent que ces professionnels souhaitent bénéficier de formations croisées avec le secteur médico-social pour mieux comprendre et accompagner les élèves.
Le rapport de la Cour des comptes souligne également le « parcours du combattant » que vivent de nombreuses familles pour scolariser leurs enfants en situation de handicap. Les élèves font face à des parcours souvent discontinus, ce qui peut générer un sentiment de mal-être et d’incertitude quant à leur avenir. La difficulté d’accès aux supports pédagogiques adaptés, les délais pour les obtenir, et le manque de places dans les instituts médico-sociaux sont autant d’obstacles qui compliquent la scolarisation de ces élèves.
Une politique d’inclusion à améliorer
Selon la Cour, il est essentiel de revoir l’actuelle politique d’accompagnement, qui se concentre largement sur l’assistance humaine. Le rapport interroge l’équilibre entre l’accompagnement individuel assuré par les AESH et d’autres actions d’accessibilité, en particulier d’ordre pédagogique. Il suggère que la dépendance excessive à l’accompagnement humain peut, dans certains cas, entraver le développement de l’autonomie des élèves.
La Cour des comptes critique également le manque de données et d’analyses sur l’impact de l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap. Sans une évaluation précise, il est difficile de mesurer l’efficacité du modèle d’inclusion français et de le comparer à d’autres pays. Le rapport pointe le manque de coordination entre les secteurs éducatif et médico-social, ce qui limite la capacité à offrir des parcours scolaires adaptés aux besoins des élèves.
L’augmentation du nombre d’AESH représente un enjeu budgétaire pour le ministère de l’Éducation nationale. La masse salariale des AESH a augmenté de 278 % entre 2013 et 2022. En 2022, le coût de l’école inclusive était estimé à 3,7 milliards d’euros. La Cour s’interroge sur la maîtrise et la soutenabilité d’une telle croissance dans un contexte de contraintes budgétaires.
De plus, le taux de chômage des personnes handicapées, qui s’élève à 12 % en 2022 contre 7 % en moyenne, reflète les limites de l’appareil de formation français à donner des chances égales à tous les jeunes. La Cour des comptes souligne la nécessité de mieux préparer les élèves en situation de handicap à leur future insertion professionnelle.
Ce rapport, critique mais constructif, invite à repenser le modèle actuel d’inclusion scolaire. Il préconise une meilleure coordination entre les structures scolaires et médico-sociales pour garantir un accompagnement plus efficace et adapté aux besoins spécifiques des élèves. La Cour propose également d’établir un référentiel professionnel pour les AESH, afin de garantir la pertinence de leur accompagnement individuel ou mutualisé.