Le voile diminue de plus de 80% les chances de décrocher un entretien en apprentissage

Une étude récente révèle une discrimination alarmante sur le marché de l’apprentissage en France. Le port du voile musulman serait un frein majeur à l’accès à un entretien après une candidature spontanée, diminuant les chances de succès de plus de 80 %. Cette enquête, menée par des chercheurs universitaires affiliés au CNRS, met en lumière l’ampleur des obstacles auxquels les femmes voilées font face dans leur parcours professionnel.
etudiante voilee apprentissage

Une étude pour évaluer les discriminations liées au voile

Entre le 21 mars et le 1er avril 2024, des chercheurs ont réalisé un testing destiné à mesurer les pénalités associées au port du voile musulman sur le marché du travail. Cette étude, menée dans le cadre de l’Observatoire national des discriminations et de l’égalité dans l’enseignement supérieur (Ondes), a été présentée par l’Université Gustave Eiffel.

Pour garantir des résultats fiables, les chercheurs ont envoyé des candidatures fictives à 2 000 petites et moyennes entreprises situées à Paris. Ces CV mettaient en avant des jeunes femmes nées en 2005, inscrites en première année de BTS « comptabilité et gestion ». Les prénoms et noms, choisis dans la base de données de l’Insee, reflétaient des origines françaises et maghrébines.

Chaque candidate fictive avait les mêmes qualifications : un bac professionnel obtenu en 2023, une expérience professionnelle identique et une résidence dans des quartiers parisiens ni populaires ni huppés. Les photos utilisées sur les CV représentaient les mêmes figurantes, avec et sans voile.

Des résultats accablants pour les femmes voilées

L’étude a mis en évidence une discrimination systémique. Le port du voile diminue de plus de 80 % les chances d’obtenir une réponse positive, que ce soit pour un entretien en présentiel ou à distance. Par ailleurs, il augmente de 25 % le taux de réponses négatives (non-réponses ou refus explicites).

Les résultats montrent que la pénalité liée au port du voile est équivalente, quelle que soit l’origine supposée des candidates. Pour les candidates présumées d’origine française, le port du voile augmente de 15,5 points (soit +25 %) le taux de réponses négatives. Chez les candidates d’origine maghrébine, l’augmentation est légèrement inférieure, à hauteur de 13,3 points (+21,1 %).

Les chances de décrocher un entretien sont également affectées. Les femmes voilées d’origine française perdent 10,8 points (-81,4 %) en probabilité d’obtenir un entretien, contre 6,7 points (-84,9 %) pour celles d’origine maghrébine.

Un obstacle dans l’accès à l’apprentissage

L’apprentissage joue un rôle crucial dans l’insertion professionnelle en France. Selon les chercheurs, ces discriminations représentent un frein majeur pour les jeunes femmes souhaitant accéder à cette voie d’entrée privilégiée vers l’emploi. Le port du voile, bien que légal dans le secteur privé sauf mention contraire dans le règlement intérieur, semble cristalliser des préjugés qui affectent directement les chances des candidates.

Les résultats de cette enquête soulèvent des questions importantes sur l’état de l’égalité des chances en France. Si le cadre légal protège les libertés religieuses, les pratiques discriminatoires montrent une dissonance entre la loi et les comportements réels sur le terrain. Cette situation appelle à une réflexion approfondie sur les moyens de promouvoir une véritable égalité dans l’accès à l’emploi, notamment pour les femmes portant le voile.

Afin de réduire ces inégalités, les auteurs de l’étude suggèrent plusieurs pistes :

  • Renforcer la sensibilisation des employeurs sur les discriminations liées à l’apparence religieuse.
  • Multiplier les initiatives de testing pour identifier les entreprises discriminantes et les inciter à adopter des pratiques inclusives.
  • Promouvoir la diversité en valorisant les entreprises qui affichent une politique proactive d’inclusion.

Cette étude met en lumière l’urgence de mettre en œuvre des politiques efficaces pour combattre les discriminations sur le marché du travail. Alors que l’apprentissage devrait être une porte d’entrée accessible pour tous les jeunes, le port du voile reste, pour beaucoup, une barrière infranchissable.

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