Une imposture digne d’une série
Le faux avocat a d’abord ciblé la présence en ligne d’un confrère légitime. En accédant à un profil d’avocat et en modifiant ses informations, il s’est créé une crédibilité instantanée : nom, photo, numéro d’inscription – tout semblait en règle. Avec ce vernis d’authenticité, il s’est présenté devant les tribunaux et a pris des dossiers, souvent techniques.
Le plus surprenant reste ses résultats : 26 affaires plaidées, 26 décisions favorables. Ce bilan a suscité l’admiration d’une partie du public… jusqu’à ce que le véritable avocat remarque l’intrusion et alerte les autorités.
Comment a-t-il trompé tout le monde ?
Son « avantage » : maîtriser les codes. Vocabulaire juridique précis, dossiers préparés, arguments structurés, confiance à l’audience. Il a pu prospérer dans les zones grises des contrôles administratifs : identité supposée vérifiée, robes et usages respectés, audience menée avec aplomb.
Le déclic est venu d’un détail : le titulaire du compte usurpé a constaté des anomalies d’accès sur son profil. L’alerte a mené à une interpellation, puis à l’ouverture d’une enquête pour exercice illégal et usurpation d’identité.
Réactions partagées au Kenya
L’affaire a divisé l’opinion. Certains saluent un « talent brut » qui prouverait que l’aisance oratoire l’emporte sur le diplôme. D’autres rappellent que le droit repose sur des garanties professionnelles : formation, déontologie, responsabilité civile, contrôles disciplinaires.
« Je voudrais exprimer ma gratitude aux personnes qui me soutiennent… Avec le temps, je pourrai dissiper ce malentendu et prouver mon innocence. »
À l’inverse, des responsables judiciaires dénoncent une mise en danger des justiciables : sans cadre, pas de filet de sécurité si le conseil est mauvais ou s’il porte atteinte aux droits de la défense.
« Ce cas reflète un problème croissant d’individus non qualifiés se faisant passer pour des avocats. »
Au-delà du buzz : les vrais enjeux
Cette histoire n’est pas qu’un fait divers. Elle révèle des failles concrètes :
- Identité numérique : un profil en ligne n’est pas une preuve absolue. Les annuaires officiels doivent renforcer l’authentification (double facteur, traçabilité, alertes de connexion).
- Chaîne de confiance : greffes, barreaux, magistrats et personnels d’audience doivent disposer d’outils rapides pour vérifier l’inscription en temps réel.
- Éthique et responsabilité : plaider, ce n’est pas seulement « bien parler ». C’est conseiller en droit, engager sa responsabilité, respecter la déontologie et assurer un suivi post-jugement.
Que risque l’intéressé ?
Les chefs d’accusation possibles : usurpation d’identité, exercice illégal de la profession d’avocat, escroquerie si des honoraires ont été perçus, voire faux et usage de faux selon les actes. Des peines de prison et des amendes sont envisageables. La justice peut aussi réexaminer des dossiers plaidés si des vices de procédure sont soulevés, même si les décisions rendues restent en principe valables tant qu’aucun grief concret n’est démontré.
Comment il a pu gagner 26 fois
Gagner ne prouve pas l’innocuité de l’imposture, mais éclaire trois facteurs :
- Préparation : il connaissait ses dossiers, s’appuyait sur des pièces solides et des moyens procéduraux efficaces.
- Procédures : nombre d’affaires se jouent sur des points techniques (délais, recevabilité, preuve) plus que sur une plaidoirie flamboyante.
- Effet de halo : l’apparence d’un avocat inscrit crée un crédit initial qui influence la perception en audience.

 
															






