Une disparition qui dévoile tout
Tout commence avec la mystérieuse disparition d’un moine supérieur d’un temple célèbre à Bangkok. Ce qui semblait être une affaire de corruption s’est rapidement transformé en une enquête tentaculaire. Les enquêteurs ont trouvé au domicile de Wilawan Emsawat, alias « Mme Golf », plus de 80 000 fichiers compromettants : vidéos, messages, photos explicites avec des religieux.
Âgée de 35 ans, Wilawan Emsawat est accusée d’avoir eu des relations sexuelles avec au moins 15 moines, certains étant des figures haut placées dans la hiérarchie religieuse. Elle aurait filmé ces rapports, puis exercé un chantage financier massif. Les sommes en jeu sont vertigineuses : plus de 385 millions de bahts (environ 10 millions d’euros) auraient transité sur ses comptes en trois ans.
« Cette femme est dangereuse. Elle a manipulé de nombreux moines de haut rang, usant de leurs faiblesses pour les faire chanter », a déclaré un enquêteur de la police royale thaïlandaise lors d’une conférence à Bangkok.
La chute de plusieurs figures religieuses
À ce jour, au moins 12 moines ont été démis de leurs fonctions et contraints à quitter leur robe safran. D’autres enquêtes sont en cours dans plusieurs temples à travers le pays. Le Bureau national du bouddhisme envisage même d’introduire une loi pénale pour sanctionner toute relation sexuelle entre moines et laïcs.
Wilawan Emsawat ne se contentait pas d’argent liquide. Elle a aussi reçu des voitures de luxe comme une Mercedes SLK200, des voyages, et même des titres de propriété. Dans une interview accordée à des médias locaux, elle a affirmé avoir été enceinte d’un moine et lui avoir réclamé près de 190 000 euros pour garder le silence.
Le scandale ne se limite pas à quelques temples isolés. Plusieurs grands établissements religieux sont désormais visés par la justice. Des traces de transactions immobilières douteuses et de détournement de dons publics ont été retrouvées. Le système tout entier semble fragilisé par ces révélations en cascade.
Une crise spirituelle pour le pays
En Thaïlande, près de 95 % de la population se réclame du bouddhisme Theravāda. La confiance dans les moines, garants de valeurs de pureté et de détachement, est aujourd’hui largement ébranlée. Ce scandale provoque une vraie crise morale et pousse une partie de la jeunesse à remettre en question l’autorité religieuse.
« Cette affaire nous montre que même les symboles de vertu peuvent tomber. C’est un choc collectif », commente un jeune étudiant de l’université Chulalongkorn.
L’enquête est toujours en cours. D’autres noms pourraient émerger. Les autorités thaïlandaises annoncent déjà de nouvelles arrestations dans les jours à venir. Plusieurs temples ont été perquisitionnés, et des mandats internationaux sont envisagés pour d’éventuels complices installés à l’étranger.
Une réaction politique inédite
Face à l’ampleur du scandale, des voix politiques s’élèvent pour réclamer une réforme en profondeur de la gestion des institutions religieuses. Le gouvernement pourrait confier à une commission indépendante le soin de surveiller les finances des temples et d’introduire un contrôle renforcé sur les comportements des moines, souvent laissés sans réelle supervision.
Dans les rues de Bangkok, beaucoup évitent désormais de donner l’aumône, une pratique autrefois quasi automatique. Le clergé bouddhiste thaïlandais devra engager un travail de reconstruction profond s’il souhaite regagner la confiance du public, en particulier celle des jeunes générations.
