Un secteur clé qui vacille
Le bâtiment représente près de 1,75 million de travailleurs en France, dont plus d’un million de salariés et des centaines de milliers d’artisans. Mais en seulement un an, ce secteur a perdu 33 000 emplois, selon les chiffres de la Fédération française du bâtiment (FFB).
Rien qu’entre les premiers trimestres de 2024 et 2025, ce sont 25 000 postes salariés qui ont disparu. La crise frappe fort, avec une baisse de 2,4 % des effectifs en un an. La FFB alerte sur une aggravation à venir, évoquant la disparition de 50 000 postes d’ici fin 2025.
Construction neuve en souffrance
Les causes sont multiples, à commencer par la faiblesse de la reprise dans la construction de logements. Après deux années de crise immobilière amplifiée par la hausse des taux de crédit, la demande reste très timide. Même avec un prêt à taux zéro élargi, les chantiers ne redémarrent pas aussi vite que prévu.
Le marché ne suit pas le rythme attendu. Les professionnels attendaient un coup d’accélérateur avec la baisse des taux d’emprunt, mais le quadruplement des taux depuis 2022 a laissé des traces profondes dans le financement immobilier.
La rénovation énergétique marque le pas
La situation est encore plus inquiétante du côté de la rénovation énergétique, qui représentait l’an dernier plus de 57 % de l’activité du secteur. Ce levier, qui avait permis de compenser la baisse de la construction, ralentit sérieusement depuis fin 2024.
Le recul de la rénovation est en partie lié aux modifications répétées des règles autour de MaPrimeRénov’. L’instabilité des conditions d’accès perturbe les entreprises et freine les particuliers. L’arrêt temporaire des rénovations d’ampleur depuis le 23 juin jusqu’au 15 septembre ne fait qu’ajouter de l’incertitude.
« Avec des marges qui s’érodent, les entreprises de bâtiment ne font qu’adapter leur personnel à l’évolution de leurs carnets de commandes… » – Olivier Salleron, président de la FFB
Des suppressions d’emplois qui auraient pu être pires
La FFB affirme que sans le maintien des rénovations monogeste dans le dispositif MaPrimeRénov’, il aurait fallu ajouter entre 20 000 et 30 000 postes supprimés en plus. La tendance reste néanmoins lourde pour l’année à venir.
Face à l’incertitude, les entreprises embauchent moins, remplacent peu les départs et gèlent parfois certains projets. Cette prudence impacte l’ensemble de la chaîne, des chefs de chantier aux ouvriers qualifiés.
Un signal d’alarme pour les jeunes
Pour les jeunes qui souhaitent travailler dans le bâtiment, le timing est délicat. Formations, alternances ou embauches post-diplôme pourraient être affectées par ce contexte instable. Le secteur reste solide à long terme, mais traverse une zone de turbulence qui complique les perspectives à court terme.
Avec ses 400 000 artisans et une présence sur tout le territoire, le bâtiment conserve un poids énorme dans l’économie française. Mais sa fragilité actuelle pourrait freiner les ambitions de rénovation et d’adaptation écologique pour les années à venir.