Des coupes budgétaires significatives sont prévues pour l’apprentissage en 2025, alors que le gouvernement français cherche à réduire les dépenses publiques dans un contexte de déficit croissant. Ces ajustements concernent principalement les aides à l’embauche des apprentis et pourraient avoir un impact majeur sur l’emploi et la formation des jeunes.
Une réduction drastique des aides à l’embauche
L’une des premières mesures concerne la suppression partielle des aides à l’embauche pour les apprentis, en particulier dans les entreprises de plus de 250 salariés. Actuellement, une prime à l’embauche de 6 000 euros est attribuée aux employeurs, un coup de pouce essentiel pour inciter à l’embauche d’apprentis, notamment ceux en formation de niveau licence et master. Selon les documents consultés par Les Échos, cette aide sera supprimée pour les grandes entreprises à partir de 2025, ce qui permettrait au gouvernement d’économiser 554 millions d’euros.
Cependant, pour compenser cette suppression, le gouvernement envisage de faire appel aux branches professionnelles pour financer une partie des aides. Ces branches seraient sollicitées à hauteur de 10 à 20 % des coûts, ce qui pourrait poser des difficultés pour certains secteurs déjà fragilisés. L’objectif affiché de former un million d’apprentis d’ici 2027 risque donc d’être compromis, si les entreprises hésitent à embaucher en raison de la réduction des incitations financières.
Un impact direct sur les centres de formation
Les centres de formation d’apprentis (CFA), qui jouent un rôle crucial dans l’alternance, ne sont pas épargnés par ces coupes budgétaires. Une réduction des subventions est également prévue, à condition que ces centres présentent une situation financière stable. Cette mesure, qui pourrait représenter 150 millions d’euros d’économies, inquiète les acteurs du secteur. En effet, de nombreux CFA dépendent de ces subventions pour offrir des formations de qualité et attirer de nouveaux apprentis. Sans ces financements, certains centres pourraient être contraints de réduire leurs effectifs ou de limiter leurs programmes, impactant directement l’accès à la formation pour de nombreux jeunes.
La question de l’imposition des apprentis
Une autre mesure envisagée pour économiser 459 millions d’euros concerne la fiscalité des apprentis. Actuellement, les revenus des apprentis sont exonérés d’impôts jusqu’à hauteur du SMIC, et ceux qui sont rattachés au foyer fiscal de leurs parents réduisent ainsi le montant imposable de leur famille. Le gouvernement propose de supprimer cette exonération fiscale, une décision qui toucherait directement le pouvoir d’achat des apprentis. Ces derniers, souvent issus de milieux modestes, pourraient se retrouver avec des revenus diminués, rendant l’apprentissage moins attractif.
De plus, d’autres ajustements fiscaux sont envisagés, notamment l’ajout de cotisations sociales pour les alternants et l’extension de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), qui est actuellement exonérée pour cette catégorie de travailleurs. Ces mesures, encore à l’état de propositions, pourraient figurer dans le projet de budget 2025, qui sera présenté au Parlement le 1er octobre prochain.
Des économies nécessaires face à un contexte budgétaire tendu
Le gouvernement est contraint de prendre ces décisions dans un contexte où les finances publiques sont sous pression. Avec un déficit prévu à 5,6 % du PIB en 2024, largement au-dessus de l’objectif de 5,1 %, des mesures d’austérité sont nécessaires pour réduire ce déficit à 3 % d’ici 2027. Ces coupes budgétaires dans l’apprentissage s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à économiser 1,1 milliard d’euros dans ce secteur, tout en cherchant à maintenir l’équilibre avec les objectifs de formation et d’emploi des jeunes.
Cependant, ces réductions budgétaires risquent de provoquer une levée de boucliers de la part des acteurs du secteur de l’apprentissage. Déjà, l’annonce de la réduction du budget de l’enseignement supérieur de plus de 900 millions d’euros en 2024 a suscité des inquiétudes, et ces nouvelles mesures pourraient accentuer le mécontentement. De nombreux responsables politiques et syndicaux craignent que ces ajustements n’aient des conséquences néfastes sur l’emploi des jeunes et sur la capacité des entreprises à former une main-d’œuvre qualifiée.
Malgré ces coupes budgétaires, le gouvernement affirme vouloir poursuivre son objectif d’atteindre un million d’apprentis d’ici 2027. Cependant, sans les aides financières et avec une pression fiscale accrue sur les apprentis et les entreprises, cet objectif pourrait être difficile à réaliser. Emmanuel Macron, qui a fait de l’apprentissage l’un des piliers de sa politique de formation, devra probablement faire face à des critiques de plus en plus vives si les entreprises peinent à embaucher et si les CFA voient leurs ressources diminuer.
Les prochains mois seront déterminants pour savoir si ces mesures seront adoptées dans leur forme actuelle ou si des ajustements seront faits pour limiter leur impact sur l’apprentissage. Le débat parlementaire à venir pourrait également offrir une opportunité de revoir certaines de ces propositions et de trouver des solutions alternatives pour maintenir le dynamisme de ce mode de formation, essentiel à l’insertion professionnelle des jeunes.