Un coût du travail qualifié nettement supérieur à celui de nos voisins
Une étude réalisée par l’institut Rexecode pour la Fédération Syntec a révélé que les entreprises françaises paient environ 8 milliards d’euros de surcoûts liés aux charges sociales, soit près de 12 % de leur masse salariale brute. Ces surcoûts concernent principalement les rémunérations supérieures à 1,4 SMIC (environ 2 520 euros bruts mensuels), un seuil relativement bas pour des emplois qualifiés.
En comparaison, les prélèvements sur le travail sont en moyenne 6 points plus élevés en France que dans des pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas pour des salaires situés entre 1,4 et 2,5 SMIC, et jusqu’à 11 points supplémentaires pour les rémunérations comprises entre 2,5 et 3,5 SMIC.
Impact sur les secteurs clés de l’économie
Les secteurs représentés par la Fédération Syntec – numérique, ingénierie, conseil, événementiel et formation professionnelle – sont particulièrement affectés par cette surfiscalisation. Ces secteurs emploient principalement des professionnels hautement qualifiés, pour lesquels la France est compétitive en termes de coût brut, mais nettement moins attractive en termes de salaire net disponible.
À poste équivalent, les salariés français perçoivent un revenu net inférieur à celui de leurs homologues allemands ou néerlandais, où les salaires bruts sont 20 % plus élevés en moyenne. Cette situation décourage les talents qualifiés de s’installer en France ou incite certains à partir à l’étranger.
Ces surcoûts entraînent des conséquences économiques directes :
- Une hausse des prix des services proposés par les entreprises françaises, réduisant leur compétitivité sur les marchés internationaux.
- Un frein à l’innovation, puisque les ressources financières sont en partie détournées pour couvrir ces charges supplémentaires.
- Une baisse de l’attractivité des métiers qualifiés, dissuadant les jeunes diplômés de poursuivre des formations longues et exigeantes.
Des prestations sociales supérieures, mais pas toujours justifiées
Si la surfiscalisation française est en partie justifiée par des prestations sociales élevées (santé, retraite, chômage), elle ne suffit pas à expliquer de tels écarts avec les autres pays européens. Selon Rexecode, même après ajustement pour la qualité des prestations, la France reste en position défavorable. En termes de performance des dépenses publiques, elle occupe une place médiane, loin derrière les pays nordiques.
Une réforme attendue pour alléger les charges sur l’emploi qualifié
Pour stimuler l’emploi qualifié et la compétitivité des entreprises, la Fédération Syntec plaide pour une réduction graduelle des charges sociales pesant sur les salaires supérieurs à 1,4 SMIC. Cette mesure pourrait être financée par un élargissement des bases fiscales à d’autres secteurs moins distorsifs, comme le patrimoine ou la consommation.
Selon les estimations, un alignement de la fiscalité française sur la moyenne européenne permettrait de :
- Créer près de 100 000 emplois qualifiés.
- Générer un gain de 0,4 point de PIB.
- Réduire les écarts de revenus disponibles entre la France et ses voisins européens.
À l’inverse, certaines propositions, comme la suppression des allègements de charges au-delà de 1,6 SMIC, risquent d’aggraver la situation. Une telle réforme augmenterait encore la pression fiscale sur les employeurs, entraînant un alourdissement du fardeau de plusieurs centaines de millions d’euros pour les entreprises.
Ce scénario serait fortement contreproductif, accentuant la perte de compétitivité et réduisant la capacité d’innovation des entreprises françaises. Les répercussions pourraient également se faire sentir sur le pouvoir d’achat des consommateurs, avec une hausse probable des prix liée à l’augmentation des coûts de production.
Une priorité pour l’économie française
La surfiscalisation de l’emploi qualifié en France soulève des enjeux cruciaux pour l’économie. Si elle permet de financer des prestations sociales de qualité, elle constitue aussi un frein à la compétitivité et à l’attractivité du pays. Un rééquilibrage fiscal apparaît nécessaire pour renforcer l’offre de travail qualifié, attirer les talents internationaux et permettre aux entreprises françaises de rivaliser sur la scène mondiale.