Le Mali saisit 3 000 kilos d’or à Barrick Gold

Le gouvernement malien a procédé à la saisie de plus de trois tonnes d’or sur le site minier de Loulo-Gounkoto, l’un des complexes aurifères les plus importants du Mali. Cette opération s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre la multinationale canadienne Barrick Gold et les autorités maliennes, un différend qui soulève des questions cruciales sur la souveraineté minière et les relations entre les États africains et les grandes entreprises extractives.
mali or

Barrick Gold, qui détient 80 % du complexe Loulo-Gounkoto, est en conflit ouvert avec l’État malien, propriétaire des 20 % restants. La junte au pouvoir accuse la compagnie de manquements financiers, notamment en ce qui concerne le paiement des taxes et la répartition des bénéfices. Selon Bamako, ces irrégularités justifient la saisie d’or, une mesure que Barrick qualifie de « contraire aux mécanismes convenus de règlement des différends ».

Cette saisie fait suite à une ordonnance conservatoire mise en œuvre début janvier 2025, avec le transfert des stocks d’or à la Banque Malienne de Solidarité à Bamako. D’après des sources industrielles, les trois tonnes saisies représentent environ 245 millions de dollars, un montant conséquent pour un pays où l’or constitue 25 % du budget national et 75 % des recettes d’exportation.

En réaction, Barrick Gold a annoncé la suspension temporaire de ses activités sur le site de Loulo-Gounkoto. Cette mine, qui générait plus d’un tiers des exportations d’or du Mali, emploie près de 8 000 personnes, dont 90 % de Maliens. La fermeture pourrait avoir des répercussions économiques significatives pour la région et l’entreprise, d’autant plus que ce site représente 14 % de la production mondiale de Barrick.

Les analystes estiment que cette interruption pourrait réduire les bénéfices avant impôts, intérêts et amortissements de Barrick Gold de 11 % en 2025. L’entreprise a également dénoncé un climat de pression croissante sur ses cadres locaux, certains étant détenus, tandis que son PDG sud-africain, Mark Bristow, fait l’objet d’un mandat d’arrêt pour blanchiment de capitaux.

Vers une souveraineté minière renforcée ?

La saisie des stocks d’or illustre la volonté du Mali de reprendre le contrôle de ses ressources naturelles. Cette démarche s’inscrit dans une tendance plus large observée en Afrique de l’Ouest, où plusieurs pays cherchent à renégocier leurs contrats avec les entreprises minières étrangères.

Adopté en 2023, le nouveau code minier malien impose des règles plus strictes en matière de redevances et de participation étatique. Certaines entreprises, comme B2Gold, ont accepté ces nouvelles conditions, tandis que Barrick a résisté, arguant que ses contributions au développement socio-économique du Mali sont déjà significatives. En 2023, Barrick avait versé 278 milliards de francs CFA (environ 433 millions de dollars) au gouvernement malien.

Cette initiative s’accompagne toutefois de risques. Si la renégociation des contrats peut augmenter les recettes publiques à court terme, elle pourrait également dissuader les investisseurs étrangers. De plus, les tensions prolongées entre le gouvernement malien et Barrick Gold risquent de nuire à la réputation du Mali comme destination d’investissements miniers.

Dans un pays où l’or représente une ressource stratégique, ce différend dépasse le simple cadre économique. Il reflète un nationalisme accru de la junte, qui cherche à affirmer son indépendance vis-à-vis des puissances étrangères tout en répondant aux attentes d’une population confrontée à des défis économiques et sécuritaires majeurs.

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