Un activiste ciblé pour ses prises de position
Le 8 mars, Mahmoud Khalil a été arrêté au pied de sa résidence universitaire par des agents fédéraux en civil. Il venait de participer à plusieurs manifestations sur le campus de Columbia, dénonçant les liens entre certaines entreprises partenaires de l’université et l’armée israélienne. Son interpellation, qualifiée de politique par ses défenseurs, marque le début d’une détention de 104 jours dans un centre pour migrants situé en Louisiane, à plus de 2000 kilomètres de New York.
Militant reconnu dans les milieux étudiants new-yorkais, Khalil est né en Syrie de parents palestiniens et est détenteur d’une carte de résident américain. Loin de cacher ses convictions, il affirme aujourd’hui avoir été ciblé en raison de son activisme pour la Palestine, ce que son équipe juridique soutient avec fermeté.
Transféré dans une prison pour migrants à Jena, en Louisiane, Khalil rapporte avoir été privé de ses médicaments pour l’ulcère, contraint de dormir sous des lumières vives allumées en permanence, et nourri de manière insuffisante.
« Rien ne peut remplacer les 104 jours qui m’ont été volés. Le traumatisme, la séparation d’avec ma femme, la naissance de mon premier enfant que j’ai été obligé de manquer. »
Ce témoignage bouleversant, livré depuis son appartement de Manhattan, quelques semaines après sa libération, rappelle les séquelles profondes que cette détention a laissées.
Des accusations politiques rejetées par le gouvernement
Le ministère de la sécurité intérieure (DHS) a rejeté les accusations de Khalil, qualifiant ses propos d’« absurdes » et l’accusant de tenir des discours jugés menaçants pour les étudiants juifs. Selon Tricia McLaughlin, porte-parole du DHS, la détention de Khalil entrait dans le cadre des prérogatives légales et visait à contrer des comportements assimilés à du soutien au terrorisme.
Malgré ces affirmations, aucune charge n’a été retenue contre lui. Ni lien avec le Hamas, ni affiliation à une organisation terroriste n’ont été prouvés. Ses avocats dénoncent une opération destinée à faire un exemple pour dissuader les autres militants pro-palestiniens sur les campus américains.
Accompagné par le Centre pour les droits constitutionnels (CCR), Khalil a déposé une plainte de 20 millions de dollars contre le Département de la sécurité intérieure, l’ICE et le secrétariat d’État. Son objectif ? Faire reconnaître les abus subis, mais aussi dénoncer une instrumentalisation du droit de l’immigration pour faire taire des opinions jugées dérangeantes.
« Ils abusent de leur pouvoir parce qu’ils se croient intouchables. Tant qu’ils ne seront pas tenus responsables, ces pratiques continueront. »
Dans sa démarche, Mahmoud Khalil précise qu’il utiliserait l’indemnisation pour soutenir d’autres personnes visées pour leurs opinions. Il se dit également prêt à renoncer à la somme, à condition de recevoir des excuses officielles et que la politique d’expulsion ciblée soit abandonnée.
« Je ne pardonnerai jamais ce qu’ils m’ont fait vivre. Mais je vais transformer cette injustice en force. » — Mahmoud Khalil