Un champion qui n’a jamais renoncé
Pour beaucoup, Hakim Arezki est d’abord un sportif comme les autres. Il s’entraîne, travaille, s’engage pour son équipe. Mais derrière le capitaine des Bleus du cécifoot, il y a un survivant. Hakim a découvert la discipline en 2004, à l’Institut national des jeunes aveugles de Paris. Au départ, c’est une bouée de sauvetage, un moyen de renouer avec le football qu’il aimait déjà enfant.
Très vite, il progresse, jusqu’à rejoindre l’équipe de France en 2009. Londres 2012 lui offre une première médaille d’argent. Douze ans plus tard, il décroche l’or à Paris, un moment d’histoire pour la France. Le match contre l’Argentine se joue aux tirs au but, sous le regard de milliers de supporters au pied de la Tour Eiffel.
« Quand j’ai marqué le premier tir au but, j’étais heureux, mais je savais que rien n’était gagné. Au tir de Fred, quand il marque, c’est l’explosion totale », confiait-il.
Quelques jours après cette victoire, il descend les Champs-Élysées avec ses coéquipiers. Il pense à Zidane, son idole kabyle. « Comme Zizou en 1998 », répète-t-il souvent, encore ému.
Le jour où sa vie a basculé
Pour comprendre le parcours d’Hakim Arezki, il faut revenir au 27 avril 2001. Ce jour-là, il participe à une marche pacifique à Azazga, en Kabylie, dans le contexte du Printemps noir. Les gendarmes algériens tirent à balles réelles. Deux projectiles l’atteignent : l’un à la cheville, l’autre en plein visage.
Le verdict est irréversible : les nerfs optiques sont sectionnés, il ne verra plus jamais. Hakim échappe pourtant à la mort. À l’hôpital d’Alger, il est laissé sans soins. Son père parvient à l’évacuer en France, où il arrive « presque mort », selon ses mots.
« La France m’a sauvé », répète-t-il dans son autobiographie Renaître dans la nuit.
Commence alors une reconstruction longue, silencieuse. Apprendre à se déplacer, recommencer à vivre, accepter un nouveau rapport au monde. Mais aussi accepter le choc, l’injustice, ce que son livre décrit comme un « cri de mémoire » pour ceux qui n’ont pas survécu.
Une renaissance grâce au sport
Le cécifoot devient pour Hakim une seconde chance. Une façon de transformer le traumatisme en moteur. Le terrain lui permet de canaliser ses douleurs, de retrouver une place dans un collectif, d’exister autrement.
Son mental impressionne. Ses coéquipiers décrivent un joueur qui ne lâche jamais, même dans les moments les plus sous pression. La finale de Paris 2024 en est l’exemple : premier à tirer, premier à marquer.
Sa famille joue aussi un rôle énorme. Ses filles, sa femme, ses parents. Leur soutien lui donne l’équilibre nécessaire pour tenir sur la durée, pour continuer à viser plus haut.
Entre la Kabylie et la France, une identité assumée
Hakim revendique une double appartenance. La Kabylie où il a grandi, et la France qui lui a offert une seconde vie. Il dédie son livre « À ma France », un hommage à la nation qui l’a accueilli, soigné, soutenu.
Chevalier de l’ordre national du Mérite en 2012 puis de la Légion d’honneur en 2024, Hakim Arezki porte son histoire comme un engagement. L’été 2025, il retourne en Kabylie présenter sa médaille d’or sur la tombe de sa grand-mère et de son ami Youssef, tué lors du Printemps noir.
« On ne lâche rien et on continue », murmure-t-il devant leurs sépultures.








