15 jours pour couper le signal
Le compte à rebours est lancé. Dans une décision consultée par l’AFP, la justice française a ordonné aux géants des télécoms — Orange, Free, SFR et Bouygues Télécom — de mettre en place « toutes les mesures les plus adaptées » pour empêcher l’accès au site et à ses sous-domaines depuis le territoire français. Si l’Arcom espérait initialement un blocage sous sept jours, le tribunal a finalement accordé un délai de quinze jours aux opérateurs pour se conformer à l’ordre.
Cette mesure n’est pas une simple recommandation. Si les fournisseurs d’accès traînent les pieds, ils s’exposent à des sanctions financières lourdes, l’Arcom ayant initialement demandé une astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Le blocage restera en vigueur tant que le site diffusera ces contenus illicites, mais pourra être levé si le site disparaît ou cesse ses activités, toujours avec l’accord du régulateur.
Dignité humaine et absence de modération
Pourquoi une telle sévérité ? WatchPeopleDie n’est pas juste un site « trash ». Avec plus de 4,5 millions d’utilisateurs inscrits revendiqués, la plateforme a fait de la « curiosité morbide » son fonds de commerce, hébergeant sans filtre des vidéos d’accidents mortels, d’homicides, de scènes de guerre et d’actes de torture. La justice a estimé que le portail porte une atteinte grave à la dignité humaine et ne dispose d’aucun mécanisme efficace pour empêcher les mineurs d’y accéder.
L’élément déclencheur de cette procédure judiciaire est précis : l’Office anticybercriminalité (OFAC) avait demandé le retrait de trois vidéos spécifiques montrant des actes de torture et de barbarie. Le site n’a jamais répondu. Face à ce silence radio et à l’absence totale de modération, l’Arcom a dégainé l’article 6-3 de la Loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN).
L’Arcom passe à l’offensive
Ce blocage s’inscrit dans un contexte de reprise en main du web par les autorités françaises. L’Arcom, soutenue par la ministre déléguée au Numérique Anne Le Hénanff, montre les muscles. Cette dernière a d’ailleurs salué la décision, affirmant que ce type de plateforme « n’a pas sa place en France ».
Au-delà de l’aspect légal, des associations comme l’Anti-Defamation League (ADL) alertent depuis longtemps sur la dangerosité sociétale de ce type de contenu. Selon leurs experts, ces sites agissent comme des chambres d’écho qui banalisent la violence extrême et peuvent servir de passerelle vers des contenus suprémacistes ou terroristes, désensibilisant au passage un public parfois très jeune.
Cette décision intervient alors que l’Arcom a également dans son viseur la plateforme de streaming Kick, attaquée pour avoir diffusé l’agonie en direct du streamer Jean Pormanove. La justice doit d’ailleurs statuer très prochainement sur ce dossier connexe.
Cette décision marque un tournant, mais la question technique reste entière : pensez-vous que le blocage par les opérateurs suffira à endiguer l’accès à ces sites face à l’utilisation massive des VPN ?








