Dans le Nord-Isère, la vie d’un jeune coiffeur a basculé en quelques jours après un simple tweet du militant d’extrême droite Damien Rieu. Le salon de coiffure « Hair Dogan », situé à Bourgoin-Jallieu, est devenu la cible de menaces et de harcèlement en ligne, suite à un post viral sur le réseau social X. Le nom du salon, choisi par un jeu de mots avec le prénom du propriétaire, Vehbi Erdogan, a été mal interprété, déclenchant une polémique inattendue.
Un jeu de mots devenu prétexte à la haine
Vehbi Erdogan, âgé de 23 ans, a ouvert son salon en janvier dernier dans sa ville natale. Comme beaucoup de commerçants, il a opté pour un nom accrocheur qui joue sur les mots, en l’occurrence « Hair Dogan », une combinaison entre le mot anglais « hair » (cheveux) et son propre nom de famille. Toutefois, ce choix anodin a été mal perçu par certains, qui y ont vu une référence politique au président turc Recep Tayyip Erdogan.
Le 29 juillet, Damien Rieu publie une photo du salon sur X, accompagnée de la légende « coiffeur turc à Bourgoin ». Ce tweet a rapidement été diffusé à grande échelle, atteignant 3 millions de vues et suscitant plus de 1 000 partages. S’il a généré des rires et des commentaires légers sur le jeu de mots, il a également attiré une vague de messages haineux et calomnieux.
En quelques heures, le salon de Vehbi Erdogan est devenu le centre d’une controverse alimentée par des accusations infondées. Sur les réseaux sociaux, certains ont suggéré que le salon servait de couverture pour des activités illégales, allant même jusqu’à accuser le propriétaire de trafic de drogue. D’autres commentaires, plus virulents, suggéraient des liens imaginaires avec des groupes islamistes.
Les avis sur Google ont également été touchés, des utilisateurs laissant des commentaires négatifs sans rapport avec la qualité des services du salon. L’un des commentaires décrit l’établissement comme « mal fréquenté », tandis qu’un autre sous-entend que le lieu est une « cache pour les islamistes ».
Réactions du propriétaire et de la communauté
Face à cette avalanche de haine, Vehbi Erdogan a exprimé son incompréhension et sa détresse.
« Je ne comprends pas pourquoi on m’attaque ainsi », confie-t-il à la presse. « C’est un jeu de mots avec mon nom de famille, rien à voir avec la politique. »
Soutenu par ses clients, qui jugent la polémique infondée, il a décidé de porter plainte pour se protéger et préserver son entreprise.
Les clients réguliers du salon, comme Ludovic et Anwar, témoignent de leur soutien au jeune coiffeur, soulignant la qualité de son travail et sa gentillesse. « Le nom du salon n’a aucune importance tant qu’il fait du bon travail », affirme Anwar.
L’impact de cette situation dépasse le cadre professionnel. Vehbi Erdogan, qui vit de son salon, éprouve désormais de la peur et du stress au quotidien. « J’ai peur qu’à tout moment quelqu’un vienne tout casser », confie-t-il. Le jeune coiffeur s’inquiète également pour la sécurité de sa famille, notamment sa femme et sa fille.
En réponse à ces menaces, Vehbi a déposé une plainte auprès des autorités locales. Il espère que cette démarche pourra apaiser la situation et mettre fin aux attaques en ligne. En parallèle, des associations et des organismes de soutien, comme la plateforme 3018 contre les cyberviolences, ont été contactés pour lui apporter une aide psychologique et juridique.
Damien Rieu, connu pour ses positions extrémistes et ses publications provocatrices, n’en est pas à sa première controverse. Ancien membre de Génération Identitaire, un groupe dissous par le gouvernement en 2021 pour incitation à la haine, il a déjà fait l’objet de plusieurs procédures judiciaires pour des actes similaires. La publication visant « Hair Dogan » s’inscrit dans une série de tweets accusés de propager la haine et la division.
