Un journaliste reconnu pour son travail de terrain
Christophe Gleizes, 36 ans, est collaborateur régulier des magazines So Foot et Society. Il s’est fait connaître pour ses enquêtes engagées sur les coulisses du football, notamment en Afrique. En mai 2024, il part en reportage en Algérie pour un article sur la Jeunesse Sportive de Kabylie (JSK), un des clubs les plus emblématiques du pays.
Son travail s’inscrit dans une démarche journalistique claire : comprendre les liens entre football, politique et société. Il a notamment coécrit « Magique système », un ouvrage dénonçant l’exploitation des jeunes footballeurs africains.
Une arrestation sur fond de tension diplomatique
Le 28 mai 2024, il est arrêté à Tizi Ouzou et placé sous contrôle judiciaire. Les autorités algériennes lui reprochent d’être entré sur le territoire avec un visa touristique, mais surtout d’avoir eu des contacts avec un dirigeant de la JSK également membre du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), une organisation qualifiée de terroriste par Alger depuis 2021.
Selon Reporters sans frontières (RSF), les premiers échanges entre Christophe Gleizes et ce responsable remontent à 2015 et 2017, bien avant cette désignation. En 2024, leur unique contact aurait été lié uniquement à la préparation de son reportage. Ce point, pourtant documenté, n’a pas suffi à convaincre le tribunal de Tizi Ouzou.
Des accusations jugées infondées
La justice algérienne retient contre lui l’apologie du terrorisme et la possession de documents à visée de propagande. Deux charges jugées disproportionnées par ses soutiens, notamment par le fondateur de So Press, Franck Annese, qui dénonce une décision « injuste » et totalement déconnectée de la réalité du métier de journaliste.
Le directeur général de RSF, Thibaut Bruttin, déclare de son côté que
cette condamnation ne démontre qu’un fait : rien n’échappe à la politique aujourd’hui
Un appel déposé, un espoir reporté
L’avocat de Christophe Gleizes a immédiatement annoncé avoir déposé un recours en appel auprès de la cour de Tizi Ouzou. Mais la procédure risque de prendre du temps : le nouveau procès ne pourra se tenir qu’à partir d’octobre, à l’ouverture de la prochaine session criminelle.
En attendant, le journaliste est incarcéré dans la prison de Tizi Ouzou. Sa famille, ses collègues et ses soutiens restent mobilisés pour obtenir sa libération et rappeler que son travail ne mérite pas une telle peine.
Une affaire qui dépasse le cadre judiciaire
Cette affaire survient dans un contexte déjà tendu entre l’Algérie et la France. Plusieurs diplomates ont été expulsés, et les relations bilatérales sont gelées sur de nombreux sujets. La détention de Christophe Gleizes, tout comme celle de l’écrivain Boualem Sansal, cristallise cette crise diplomatique et renforce les inquiétudes autour de la liberté de la presse dans la région.
Malgré les déclarations du ministère français des Affaires étrangères exprimant ses regrets, aucun appel clair n’a été lancé en faveur de sa libération. Pour l’instant, la stratégie semble se limiter à un suivi consulaire.