Des « coopératives » gérées par les prostituées
Oubliez le terme « maison close », qui traîne une réputation sulfureuse. Jean-Philippe Tanguy cherche d’ailleurs un nouveau nom pour son projet. L’idée centrale du député de la Somme est de créer des structures sécurisées fonctionnant sur un modèle coopératif. L’objectif affiché est clair : ne laisser aucune place au proxénétisme.
La seule solution, c’est que les prostituées soient leurs propres patronnes, qu’elles soient impératrices dans leur royaume.
Concrètement, cette proposition de loi, qui a reçu le soutien de Marine Le Pen, permettrait aux travailleurs et travailleuses du sexe de :
- Exercer dans des lieux sécurisés plutôt que dans la rue ou les bois.
- S’affranchir de la tutelle des proxénètes.
- Bénéficier de droits sociaux classiques, comme cotiser pour le chômage ou la retraite.
Le constat d’échec de la loi de 2016
Pourquoi remettre ce sujet sur la table maintenant ? Pour Jean-Philippe Tanguy, le système actuel est le « summum de l’hypocrisie ». Il vise particulièrement la loi de 2016 votée sous François Hollande, qui pénalise les clients. Selon lui, cette mesure a eu l’effet inverse de celui escompté : elle a poussé les prostituées à se cacher davantage, rendant leur quotidien plus dangereux.
Le député s’appuie sur sa propre expérience de terrain. Il raconte avoir été bénévole auprès de l’association « Bus des femmes » au bois de Boulogne, où il a été témoin de la précarité et de la violence subies par ces femmes. Les chiffres semblent corroborer une situation tendue : en 2024, 1 579 victimes de proxénétisme ont été recensées en France, dont 659 mineures.
Un projet qui divise, même en interne
Si la « première version » du texte est prête, elle ne fait pas l’unanimité. Du côté des associations, l’accueil est glacial ou méfiant :
- L’Amicale du Nid juge « inimaginable » de recréer des lieux « où l’on enfermerait des êtres humains » pour des besoins sexuels.
- Le Strass (Syndicat du travail sexuel), bien que favorable aux coopératives, refuse toute alliance avec le RN, citant leur position sur l’immigration.
Surprise également au sein même du Rassemblement National. Alors que Tanguy assure avoir l’aval de Marine Le Pen, un autre cadre du parti a confié à RTL découvrir le projet dans la presse, affirmant qu’il n’en avait « jamais été question ».
Historiquement, la France avait fermé ses 1 400 maisons de tolérance en avril 1946. Ironie de l’histoire, Marthe Richard, l’instigatrice de cette fermeture, avait fini par regretter sa décision en 1973, admettant qu’on ne peut empêcher la prostitution et évoquant le « moindre mal ». Le débat devrait s’ouvrir à l’Assemblée une fois le vote du budget passé.








