Qui est Abou Mohammed al-Jolani ?

abou mohammed al jolani

Abou Mohammed al-Jolani, de son vrai nom Ahmed al-Chareh, est une figure incontournable de la guerre civile syrienne. Né en 1982 à Riyad, en Arabie saoudite, il grandit dans le quartier cossu de Mazzé à Damas, dans une famille aisée. Son parcours débute par des études de médecine qu’il abandonne après l’invasion américaine de l’Irak en 2003, moment où il rejoint les rangs d’Al-Qaïda en Irak.

Ses débuts dans le djihadisme

Après avoir combattu sous la direction d’Abou Moussab al-Zarqawi, chef d’Al-Qaïda en Irak, Jolani est emprisonné durant cinq ans dans des camps américains. Sa détention marque un tournant décisif. À sa libération, il revient en Irak, puis en Syrie en 2011, au début de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad. Là, il fonde le Front al-Nosra, qui deviendra plus tard Hayat Tahrir al-Sham (HTS), un des groupes rebelles les plus puissants du conflit syrien.

Une rupture stratégique avec al-Qaïda

En 2016, Jolani annonce une rupture officielle avec al-Qaïda, rebaptisant son groupe sous le nom de Jabhat Fatah al-Sham, avant sa transformation en HTS en 2017. Ce geste stratégique visait à améliorer son image auprès des communautés locales et des acteurs internationaux. Malgré cette tentative de distanciation, HTS reste classé comme groupe terroriste par plusieurs pays, et Jolani est considéré comme un « radical pragmatique » par des experts comme Thomas Pierret du CNRS.

Sous la direction de Jolani, HTS a établi une administration civile dans le gouvernorat d’Idleb, perçue par certains comme une tentative de consolider son pouvoir local. Cette administration perçoit des impôts, contrôle les douanes et gère des services publics, tout en assouplissant l’application de la charia pour gagner l’adhésion des populations locales. Jolani multiplie également les gestes symboliques envers les minorités, notamment les chrétiens.

En décembre 2024, HTS lance une offensive éclair sur plusieurs fronts, capturant des villes clés comme Alep, Hama et, enfin, Damas. Cet assaut marque la chute du régime de Bachar al-Assad, au pouvoir depuis 2000. Jolani, désormais présenté sous son nom de naissance Ahmed al-Chareh, se rend à la mosquée des Omeyyades à Damas pour célébrer cette victoire. Il appelle à la préservation de la sécurité et au respect des institutions publiques, tentant de projeter une image de chef d’État en devenir.

Transformation de l’image : opportunisme ou stratégie ?

Depuis sa rupture avec al-Qaïda, Jolani tente de se distancier de son passé djihadiste. Il abandonne progressivement le turban des djihadistes pour un uniforme militaire ou un costume civil lors d’apparitions publiques. Des analystes comme Aron Lund soulignent que cette transformation est avant tout politique, visant à rassurer les populations syriennes et la communauté internationale. Cependant, cette évolution reste perçue avec scepticisme, notamment en raison des exactions attribuées à HTS par des ONG et des habitants d’Idleb.

Malgré les efforts de Jolani pour repositionner HTS comme un acteur politique légitime, le groupe reste une source de préoccupation majeure pour la communauté internationale. Le spectre de l’État islamique, toujours actif en Syrie, et les tensions entre les factions rebelles risquent de fragiliser davantage la région.

La chute de Bachar al-Assad ouvre une nouvelle ère pour la Syrie, mais l’avenir reste incertain. Jolani devra naviguer entre ses ambitions politiques et la gestion des tensions internes à HTS. La possibilité d’une transition pacifique dépendra de sa capacité à convaincre les Syriens et les acteurs internationaux de ses intentions.

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