Le documentaire “Au boulot !”, réalisé par François Ruffin et Gilles Perret, met en lumière une aventure étonnante pour l’avocate et chroniqueuse Sarah Saldmann. Habituée aux plateaux télévisés et aux débats controversés sur des chaînes comme CNews, Saldmann a accepté de vivre plusieurs semaines dans la peau de Français payés au SMIC. Ce projet est né suite à une de ses déclarations chocs dans l’émission “Les Grandes Gueules”, où elle qualifiait de « feignasses » ceux qui ne travaillent pas et vivent des aides sociales.
L’idée de ce film est née lors d’un plateau télévisé en février 2023, où François Ruffin a confronté Sarah Saldmann à propos de ses propos sur le travail et les assistés. Dans un échange vif, Ruffin l’a mise au défi de vivre pendant un mois avec un salaire au SMIC, une proposition qu’elle a d’abord refusée avant d’y réfléchir davantage. Après plusieurs échanges, notamment lors d’une rencontre fortuite à BFMTV, Saldmann finit par accepter le défi, motivée par l’envie de découvrir une réalité qui lui semblait éloignée de la sienne.
Dans “Au boulot !”, Sarah Saldmann est filmée dans des conditions de travail difficiles, confrontée à des métiers qu’elle n’aurait jamais envisagés. Le tournage s’est étalé sur environ un an, avec des séquences de plusieurs jours réparties dans différentes régions de France. Sans savoir à l’avance ce qui l’attendait, elle a testé divers métiers peu qualifiés et très physiques. Parmi les professions auxquelles elle s’est essayée, on trouve :
- Serveuse
- Livreuse de colis
- Auxiliaire de vie
- Ouvrière en usine
- Technicienne en fibre optique
Chaque poste a apporté son lot de défis, mais c’est le travail en usine, notamment dans une entreprise de transformation de poisson, qui l’a le plus marquée. Elle décrit cette expérience comme “le paroxysme de la difficulté”, avec des conditions physiques éprouvantes, notamment à cause de la répétitivité des tâches et des horaires extrêmement matinaux.
Au début du documentaire, Sarah Saldmann arrive avec ses opinions bien tranchées sur les personnes qui, selon elle, ne font pas assez d’efforts pour travailler. Cependant, au fil des semaines, sa vision évolue. Elle confesse avoir sous-estimé la pénibilité de certains métiers et reconnaît que, même avec la meilleure volonté du monde, il est parfois impossible de continuer à travailler dans de telles conditions.
Elle explique notamment que son passage à l’usine lui a ouvert les yeux sur les réalités du travail physique. “Quand on est en bonne santé, c’est déjà dur. Alors, avec une angine ou un rhume, je comprends totalement que ce soit encore plus compliqué”, déclare-t-elle dans une interview sur le tournage du documentaire. Cette prise de conscience marque un tournant dans sa perception des travailleurs précaires.
Au-delà de la simple immersion de Sarah Saldmann dans le monde des travailleurs au SMIC, “Au boulot !” met en avant des problématiques plus larges liées à la précarité et aux inégalités sociales. François Ruffin utilise l’histoire de Saldmann comme point d’entrée pour sensibiliser le public à la vie de millions de Français qui peinent à joindre les deux bouts.
Le film aborde aussi le sujet de la réinsertion sociale, mais dans un sens détourné : celui de la réinsertion des riches. Ruffin joue avec cette idée en montrant combien ceux qui sont déconnectés des réalités de la pauvreté gagneraient à découvrir ce que signifie réellement travailler pour un salaire minimum.
François Ruffin a souvent utilisé l’ironie et la satire pour faire passer ses messages, et “Au boulot !” ne fait pas exception. Le documentaire questionne la notion de privilège et la déconnexion de certaines élites face aux réalités du quotidien de nombreux travailleurs. Il invite à se demander si les élites économiques et politiques ne devraient pas, elles aussi, expérimenter la vie des classes populaires pour mieux comprendre leurs difficultés.
Sarah Saldmann a suscité la polémique par ses prises de position tranchées sur les plateaux télévisés, notamment concernant l’assistanat et la responsabilité individuelle. Son rôle dans “Au boulot !” a divisé, notamment au sein de la sphère politique. La députée européenne LFI, Rima Hassan, a même déclaré vouloir boycotter le film, arguant que les positions de Saldmann sur le conflit israélo-palestinien ne la rendaient pas légitime pour apparaître dans un tel projet.
Malgré les critiques, François Ruffin insiste sur le fait que le film ne porte pas sur la personne de Saldmann, mais sur la condition des travailleurs en France. Il souhaite avant tout mettre en lumière des réalités invisibles, que les médias traditionnels ne montrent que trop peu.