Un sentiment de déclassement qui s’installe
Parmi les 7,6 millions de jeunes actifs concernés, une large majorité (83 %) juge que ses compétences sont adaptées à son poste. Mais pour environ un sur sept, la réalité est différente. Ces jeunes expliquent que leur niveau de formation et leur expérience ne sont pas exploités à la hauteur de ce qu’ils pourraient apporter.
Ce sentiment de déclassement n’est pas anodin : il peut provoquer une perte de motivation, un désengagement professionnel ou même une envie de reconversion rapide.
Précarité et déclassement, un duo fréquent
L’étude montre que ce ressenti est particulièrement marqué chez les jeunes qui n’ont pas de stabilité professionnelle. 23 % des jeunes en CDD ou intérim déclarent être surqualifiés pour leur emploi, contre 14 % chez ceux en CDI ou fonctionnaires.
« Les jeunes en contrats précaires occupent plus souvent des postes d’ouvriers ou d’employés peu qualifiés, ce qui explique leur sentiment de déclassement plus fréquent », souligne l’Insee.
Ce contraste illustre une réalité dure : plus le contrat est instable, plus la probabilité d’occuper un poste qui ne correspond pas aux compétences réelles augmente.
Qui sont les plus touchés ?
Le déclassement n’est pas uniforme selon les métiers. Il varie fortement selon la catégorie socioprofessionnelle :
Catégorie | % de jeunes se sentant déclassés |
---|---|
Cadres | 10 % |
Agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d’entreprise | 10 % |
Employés qualifiés | 18 % |
Employés peu qualifiés | 28 % |
Ouvriers qualifiés | 14 % |
Ouvriers peu qualifiés | 22 % |
Le contraste est frappant : seuls 10 % des jeunes cadres ou indépendants se sentent surqualifiés, contre près de 3 sur 10 chez les employés peu qualifiés.
Le rôle du diplôme dans ce décalage
Autre facteur déterminant : le niveau d’études. Les jeunes titulaires d’un bac général sont particulièrement concernés, avec près d’un tiers qui estiment occuper un poste en dessous de leurs compétences. À l’inverse, les extrêmes de la pyramide sont moins touchés : seulement 12 % des diplômés d’un bac+5 et 11 % des jeunes sans diplôme se disent surqualifiés.
Le problème se concentre donc sur les jeunes qui possèdent un diplôme intermédiaire (bac, bac+2, bac+3/4), souvent confrontés à une grande diversité de débouchés… mais pas toujours valorisants.
L’ancienneté comme facteur d’équilibre
Bonne nouvelle : avec le temps, ce sentiment de déclassement tend à diminuer. Selon l’Insee, 19 % des jeunes qui viennent de prendre un poste se sentent surqualifiés, mais ce chiffre tombe à 11 % après 5 ans ou plus dans le même emploi.
Deux raisons principales sont avancées : soit les responsabilités augmentent au fil des années, soit les jeunes qui se sentent trop à l’étroit finissent par changer de poste pour retrouver une meilleure adéquation avec leurs compétences.
Pourquoi c’est un enjeu majeur
Se sentir surqualifié n’est pas seulement un problème individuel, c’est aussi un signal pour l’économie. Cela révèle une mauvaise allocation des compétences, qui pourrait peser sur la productivité et sur la motivation d’une génération déjà marquée par la précarité et la pression du marché du travail.
Pour les jeunes actifs, la question n’est pas seulement de trouver un emploi, mais de trouver un poste qui reconnaisse leur vrai niveau. Pour les entreprises, le défi est clair : mieux valoriser les compétences disponibles, sous peine de voir les talents s’échapper.