La 4e année d’internat a été conçue comme une phase de consolidation pour les futurs médecins généralistes, avec un statut de docteur junior. L’objectif affiché est double : renforcer leur insertion professionnelle et améliorer l’accès aux soins dans les zones sous-denses grâce à des stages en ambulatoire.
Cependant, depuis son adoption dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale 2023, la mise en œuvre de cette réforme s’est heurtée à de nombreux obstacles. Deux ans après son officialisation, plusieurs éléments cruciaux restent flous, suscitant la colère des étudiants en médecine.
Des retards accumulés dans la mise en œuvre
Selon l’Isnar-IMG (Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale), les retards dans l’organisation de cette réforme compromettent sérieusement son application. Parmi les principaux problèmes identifiés :
- Absence de textes réglementaires clairs : malgré l’arrêté d’août 2023 qui a défini la nouvelle maquette pédagogique, aucune avancée concrète n’a été constatée depuis.
- Terrains de stage insuffisants : le manque de maîtres de stage universitaires (MSU) rend impossible la généralisation des stages en ambulatoire, qui devaient être le pilier de cette 4e année.
- Conditions d’accueil incertaines : les modalités de supervision, la rémunération et le statut des docteurs juniors ambulatoires n’ont pas encore été définis.
Ces lacunes ont conduit à une situation où plus de la moitié des internes de certaines grandes villes, comme Paris, devront effectuer leur 4e année à l’hôpital, alors que celle-ci était initialement prévue pour se dérouler majoritairement en ambulatoire.
Rémunération et statut des docteurs juniors ambulatoires
La question de la rémunération est l’un des principaux points de tension. Actuellement, les docteurs juniors hospitaliers perçoivent environ 2 375 euros brut par mois, auxquels s’ajoutent les revenus issus des gardes. Cependant, ce modèle n’est pas directement applicable aux docteurs juniors ambulatoires, qui ne peuvent pas réaliser de gardes dans les mêmes conditions.
L’Isnar-IMG propose un modèle de rémunération mixte, combinant un salaire de base et une part variable en fonction des actes effectués. Ce modèle, bien que plus adapté, n’a pas encore été validé par le gouvernement.
En parallèle, le statut même de docteur junior ambulatoire reste flou. Pour y accéder, les internes doivent avoir soutenu leur thèse, mais les retards dans l’encadrement universitaire rendent cette exigence difficilement réalisable.
Une mobilisation nationale prévue le 29 janvier
Pour faire entendre leurs revendications, les internes appellent à une grève nationale le 29 janvier, accompagnée d’une manifestation à Paris. Ils demandent principalement :
- Le report de la réforme pour permettre une préparation adéquate.
- La définition claire des conditions d’accueil et de supervision des internes.
- Une rémunération équitable et adaptée au contexte ambulatoire.
Le mouvement est soutenu par d’autres syndicats d’internes, comme l’Isni, qui plaide également pour une revalorisation globale des rémunérations des étudiants en médecine.
Un contexte politique tendu
La mise en œuvre de cette réforme intervient dans un contexte de changements fréquents au sein du gouvernement. En deux ans, six ministres de la santé se sont succédé, ralentissant la prise de décisions. L’arrivée de Yannick Neuder comme ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins suscite l’espoir d’un dialogue plus constructif avec les internes.
Cependant, la réforme de la 4e année d’internat reste un dossier épineux, révélateur des tensions plus larges dans le système de santé français, marqué par des pénuries de médecins et des inégalités territoriales dans l’accès aux soins.
Cette réforme, bien qu’ambitieuse, soulève des questions fondamentales sur la formation des médecins généralistes et leur capacité à répondre aux défis du système de santé. L’accent mis sur les stages en zones sous-denses pourrait contribuer à réduire les déserts médicaux, mais seulement si les conditions d’accueil et de formation des internes sont adaptées.
Voir aussi : les formations dans la santé