Un changement de calendrier à l’origine de la tradition
Pour comprendre cette tradition, il faut remonter au XVIe siècle. À cette époque, l’année ne commençait pas le 1er janvier comme aujourd’hui, mais autour du 25 mars. Et les festivités s’étiraient souvent jusqu’au 1er avril. On s’échangeait alors des cadeaux pour fêter le nouvel an.
En 1564, le roi Charles IX décide, via l’édit de Roussillon, que la nouvelle année débutera désormais le 1er janvier. Ce changement n’a pas été adopté par tout le monde immédiatement. Certaines personnes ont continué à fêter le Nouvel An à l’ancienne date… ce qui a inspiré des moqueries. On leur faisait alors des cadeaux absurdes ou des blagues pour se moquer d’eux.
Pourquoi un poisson ?
Le choix du poisson n’est pas anodin, même si plusieurs explications coexistent. Une des plus courantes est liée au carême. Pendant cette période religieuse, la viande est interdite, mais le poisson est autorisé. Blaguer autour du poisson serait alors une manière détournée de jouer avec les règles religieuses, parfois pour les critiquer, parfois juste pour rire.
Une autre hypothèse évoque la fermeture de la pêche en avril, période de reproduction des poissons. Offrir un faux poisson serait donc une manière de faire référence à une pêche impossible — une blague, en somme.
Certains historiens rappellent aussi que le poisson est un symbole chrétien ancien, utilisé par les premiers chrétiens comme signe de reconnaissance. Dans cette version, le poisson aurait été utilisé comme élément symbolique dans les farces du printemps.
Des blagues ancrées dans la culture populaire
Le 1er avril est devenu un jour de licence humoristique. On peut se moquer, faire des canulars, lancer des infox — tant que ça reste bon enfant. Dans certaines écoles, les enfants s’accrochent des poissons en papier dans le dos, et dans les entreprises, les équipes rivalisent d’imagination pour piéger leurs collègues.
Ce n’est pas seulement une fête des enfants. Les médias s’en emparent aussi, chaque année, pour glisser des fausses infos bien ficelées, parfois très crédibles, parfois complètement absurdes.
Exemples de poissons médiatiques célèbres
- La BBC annonçant en 1957 une récolte de spaghettis en Suisse, avec des images truquées de pâtes poussant dans les arbres.
- En 2008, encore la BBC, avec une vidéo de pingouins capables de voler.
- La marque Virgin Atlantic a un jour dévoilé un avion battant des ailes pour voler plus proprement.
Des variantes dans le monde entier
Le poisson d’avril n’est pas propre à la France. Dans d’autres pays, on fait aussi des blagues ce jour-là, mais les coutumes diffèrent.
Au Royaume-Uni
On parle de April Fool’s Day, et les blagues sont autorisées uniquement jusqu’à midi. Passé ce délai, c’est celui qui fait la blague qui devient le « fool ».
En Écosse
La tradition dure deux jours. Le premier est consacré aux farces classiques, le second — Tailie Day — est réservé aux blagues autour des fesses, comme accrocher des queues dans le dos des gens.
Aux Pays-Bas
Les habitants jettent parfois des harengs sur les passants en criant « haringgek » (hareng fou).
En Espagne
Les farces ont lieu le 28 décembre, jour des Saints Innocents, avec des blagues très proches de celles du 1er avril français.
En Inde
La fête de Holi, célébrée en mars, est aussi un moment de rires, de couleurs et de jeux. Certains y voient un ancêtre spirituel du 1er avril.
Une tradition ancienne et mouvante
On retrouve des traces très anciennes de cette fête. Un poème flamand de 1561 évoque déjà des courses absurdes confiées à un serviteur, qui s’interroge à chaque mission sur le fait d’être piégé. C’est peut-être là l’origine des fameuses « courses de fous ».
En France, les premiers textes mentionnant le terme « poisson d’avril » remontent au XVe siècle, et au fil des siècles, cette expression est devenue synonyme de farce gentille ou de petit canular joyeux.
Certains chercheurs évoquent aussi des fêtes antiques du printemps, comme les Hilaria romaines, qui autorisaient toutes les inversions de rôles et les moqueries. Un moment où, pour une journée, les règles pouvaient être suspendues.
Et aujourd’hui ?
Chaque année, le 1er avril revient avec son lot de surprises. Entre pièges organisés sur les réseaux sociaux, publicités absurdes et poissons de papier glissés discrètement dans le dos, la tradition reste bien vivante.
Et même si l’origine exacte reste floue, le plaisir de rire ensemble continue de rassembler toutes les générations, le temps d’une journée pas comme les autres.
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