Une mission de routine devenue historique
Tout commence le 4 mars dernier. Lors d’un test de sonar dans le cadre de la stratégie de surveillance des fonds marins, un signal inhabituel apparaît à l’écran. Un drone autonome est envoyé sur place, suivi rapidement par un robot sous-marin télécommandé. Les premières images sont claires : il s’agit bien d’un navire couché sur le sable, parfaitement conservé malgré ses 500 ans de sommeil.
Le bateau mesure environ 30 mètres de long pour 7 mètres de large. Il n’a jamais été pillé, probablement grâce à sa profondeur qui le rendait inaccessible jusqu’à aujourd’hui.
D’après les premières analyses menées par le Drassm (Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines), le navire aurait quitté un port de Ligurie, dans le nord de l’Italie. À son bord, une cargaison précieuse : plus de 200 pichets en céramique, des assiettes jaunes empilées, deux chaudrons, des barres de fer, une ancre, et même six canons en fonte.
Les pichets sont décorés de motifs religieux et végétaux, certains marqués du monogramme IHS, symbole du Christ. Le tout est resté parfaitement figé dans le temps, ce qui laisse penser que le naufrage n’a pas été violent. Aucun impact ni signe de combat n’a été relevé.
Une capsule du passé entre merde du présent
Si les objets du XVIe siècle sont en état remarquable, les images ont révélé un autre détail plus inquiétant : la présence de déchets modernes parmi les vestiges. Canettes, gobelets, emballages plastiques et même une paire de menottes rouillées sont visibles autour de l’épave. Une pollution qui atteint même les profondeurs les plus extrêmes de la Méditerranée.
Pour les experts, cette découverte est double : à la fois scientifique et symbolique. Elle raconte l’histoire d’un navire oublié mais aussi celle de notre impact contemporain sur les fonds marins.
Une étude longue et high-tech à venir
Le Drassm, en partenariat avec la Marine nationale, prévoit la création d’un jumeau numérique en 3D du site. L’idée est de cartographier avec précision chaque objet, chaque détail, sans perturber l’équilibre fragile de l’épave. Les prochaines étapes incluent des prélèvements ciblés, des analyses de céramique et une étude des métaux retrouvés.
Une exposition publique pourrait voir le jour dans les prochaines années, afin de partager cette découverte avec le grand public. D’ici là, les chercheurs poursuivront leur enquête pour retracer le voyage de ce navire, son itinéraire, et peut-être percer le mystère de son naufrage silencieux.
Une trouvaille qui redonne de l’élan à l’archéologie sous-marine
Avec cette épave baptisée Camarat 4, la France ajoute une pièce majeure à son patrimoine subaquatique. Elle rejoint les grandes découvertes récentes tout en soulignant l’intérêt de continuer à explorer les fonds marins, même les plus inaccessibles.
Cette capsule temporelle oubliée à 2 567 mètres sous la surface est bien plus qu’un navire. Elle est le témoin silencieux d’un autre temps… et du nôtre.