Le contenu du projet de loi
La proposition de loi permettrait aux filles de se marier dès l’âge de neuf ans et aux garçons à partir de 15 ans, sous certaines conditions. Cette initiative donnerait également aux couples la possibilité de choisir entre les tribunaux civils et les autorités religieuses pour traiter leurs affaires familiales. Les partisans du projet soutiennent qu’il offre aux citoyens la liberté de suivre leurs convictions religieuses en matière de statut personnel. Cependant, les critiques affirment que cela pourrait ouvrir la voie à des mariages d’enfants et à une exploitation accrue des jeunes filles.
Les organisations de défense des droits des femmes, les militants de la société civile et les groupes de défense des droits humains ont exprimé une opposition farouche à ce projet de loi. Ils préviennent que l’adoption de cette législation pourrait avoir des conséquences désastreuses sur la santé, l’éducation et le bien-être des jeunes filles, entraînant des taux d’abandon scolaire plus élevés, des mariages forcés et une augmentation des violences domestiques.
Yanar Mohammed, présidente de l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak (OWFI), a déclaré que cette législation priverait les femmes irakiennes des droits durement acquis au fil des années. Elle a accusé le Cadre de coordination, la coalition derrière le projet de loi, d’utiliser des lois archaïques pour détourner l’attention de leurs propres échecs politiques et de la corruption endémique.
Manifestations et oppositions
La proposition a déclenché des manifestations à travers le pays, notamment sur la place Tahrir à Bagdad, où des centaines de manifestants ont brandi des pancartes appelant à l’égalité des sexes et à la protection des droits des enfants. Des slogans tels que « Non au mariage des mineures » et « L’ère de l’esclavage des femmes est révolue » ont résonné lors des rassemblements.
Des parlementaires, dont certains membres de l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak (OWFI) et des députés kurdes, se sont également opposés à ce projet de loi. Ils craignent que de telles mesures ne renforcent les divisions sectaires et n’exacerbent les inégalités entre les sexes. Aso Feridun, député kurde, a averti que permettre le mariage à un âge aussi précoce serait une menace sérieuse pour la société irakienne et priverait les enfants de leur enfance.
Les critiques du projet de loi soulignent que ces modifications pourraient avoir des répercussions profondes non seulement sur les droits des femmes, mais aussi sur l’ensemble de la société irakienne. En autorisant les mariages de mineures, le projet de loi risque de légitimer des pratiques qui réduisent les femmes à des rôles traditionnels et restreignent leur autonomie.
Le projet de loi pourrait également aggraver les divisions sectaires en permettant que les affaires familiales soient réglées selon des lois sectaires. Cela donnerait aux autorités religieuses sunnites et chiites une influence considérable sur les questions de statut personnel, au détriment de l’État de droit.
Malgré l’opposition croissante, le Cadre de coordination insiste sur le fait que les amendements proposés sont conformes à la constitution irakienne et respectent les principes de la charia et de la démocratie. Les partisans du projet de loi affirment qu’il garantit la liberté religieuse et protège les jeunes filles de ce qu’ils considèrent comme des « relations immorales ».
Le débat intense autour de ce projet de loi reflète la lutte continue pour les droits des femmes en Irak. Alors que le pays continue de naviguer entre traditions et modernité, la question du mariage des enfants reste un sujet brûlant. Le sort du projet de loi reste incertain, mais il a déjà déclenché une mobilisation importante et un débat national sur le rôle de la religion et de la loi dans la vie personnelle des citoyens.