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Meta annonce mettre fin à son programme de fact-checking

Le 7 janvier, Meta, maison mère de Facebook, Instagram, et WhatsApp, a officialisé la fin de son programme de fact-checking aux États-Unis. Mark Zuckerberg, PDG de l’entreprise, a précisé que cette initiative serait remplacée par un système de notes communautaires, semblable à celui déjà en place sur X (anciennement Twitter), propriété d’Elon Musk. Selon Zuckerberg, les fact-checkers ont « contribué à réduire la confiance au lieu de l’améliorer », en particulier aux États-Unis.

© Instagram

Les nouvelles notes communautaires permettront aux utilisateurs d’ajouter des informations contextuelles à des publications jugées potentiellement trompeuses. Ce système, adopté par X en 2021, repose sur la collaboration des internautes pour vérifier et contextualiser les informations. Les utilisateurs peuvent proposer des notes, qui seront ensuite évaluées par d’autres membres de la communauté en fonction de leur utilité et pertinence.

Ce changement marque une rupture nette avec la stratégie de Meta depuis 2016, où l’entreprise collaborait avec des organisations journalistiques pour vérifier l’exactitude des contenus publiés sur ses plateformes.

L’annonce de Meta a suscité des inquiétudes parmi les experts en lutte contre la désinformation. Russ Burley, cofondateur du Centre de résilience de l’information (CIR), a déclaré que « reculer sur le fact-checking sans alternative crédible ouvre la porte à un flot de contenus encore plus dangereux ». Selon lui, la désinformation évolue rapidement et nécessite une surveillance rigoureuse, que le système communautaire pourrait ne pas garantir.

En Europe et dans d’autres régions, les régulateurs et spécialistes des médias s’inquiètent également des conséquences de cette décision. Le Digital Services Act (DSA) en Europe impose aux grandes plateformes des obligations strictes en matière de modération, rendant improbable un déploiement rapide de ce système en dehors des États-Unis.

La décision de Meta intervient dans un contexte politique marqué. Depuis plusieurs années, Donald Trump et ses alliés républicains critiquent les programmes de fact-checking, les qualifiant de censure dirigée contre les discours conservateurs. Cette suppression est perçue par certains comme une tentative de Meta de se rapprocher du camp républicain.

Zuckerberg a notamment multiplié les gestes envers Trump, comme un don d’un million de dollars pour les cérémonies d’investiture de janvier 2025, ou encore la nomination de Joel Kaplan, proche du président, à la tête des affaires publiques de Meta.

Les impacts pour les partenaires journalistiques

Depuis 2016, Meta collaborait avec plus de 80 organisations de fact-checking dans le monde, dont l’AFP, pour vérifier les contenus dans plus de 60 langues. Cette initiative avait permis de limiter la diffusion de fausses informations sur Facebook, Instagram et WhatsApp. La fin de ce programme représente un coup dur pour ces partenaires, particulièrement pour les petites rédactions dépendantes de ce financement.

En France, l’Agence France Presse et des médias comme 20 Minutes ou France 24 faisaient partie des principaux partenaires. Ces collaborations ont non seulement permis de limiter la propagation de désinformation, mais ont également renforcé la crédibilité des contenus sur les plateformes Meta.

Les défis du système de modération communautaire

Le passage à un système de modération collective pose des questions sur son efficacité. Bien que les notes de communauté aient montré une réduction de la diffusion de désinformation sur X, elles restent vulnérables aux manipulations de groupes organisés. Christine Balagué, experte en désinformation, souligne que « laisser la vérification aux utilisateurs peut permettre une certaine démocratie, mais ouvre également la porte à des abus par des acteurs malveillants ».

En outre, la fiabilité des notes dépend fortement de la diversité des contributeurs. Si ces derniers partagent des biais communs, les contenus malveillants ou trompeurs pourraient passer entre les mailles du filet.