Qui est Tommy Recco ?

Pendant plus de soixante ans, le nom Tommy Recco a hanté les pages faits divers et les couloirs des prisons françaises. Né en Corse, condamné pour sept meurtres et un braquage sanglant, il est devenu le détenu ayant passé le plus de temps derrière les barreaux en France. Mort en novembre 2025 à 91 ans, son histoire mélange tragédie familiale, crimes d’une violence extrême et long combat judiciaire autour de la perpétuité réelle.
tommy reco

Des quais de Propriano aux salles d’assises

De son vrai nom Joseph-Thomas Recco, il naît en 1934 à Propriano, dans une famille de pêcheurs corses très nombreuse. Enfant, il aide son père à poser les filets et grandit dans une ambiance dure, entre mer, petits boulots et drames familiaux à répétition. Autour du clan circule même une légende locale, celle d’une « malédiction de la tortue », censée frapper la famille depuis que son père aurait tué une tortue géante dont la carapace aurait servi de berceau. 

À l’adolescence, Tommy quitte l’école tôt. Service militaire dans la Marine, retour en Corse, pêche à la langouste, petits trafics… Il se forge une image de type charismatique, un peu grande gueule, capable de séduire les touristes. C’est dans cet environnement qu’il commence à flirter avec l’illégalité, jusqu’au basculement de 1960.

1960 : le premier meurtre, celui du parrain

Le 28 octobre 1960, sur une plage près de Propriano, Tommy Recco est surpris en train de pêcher à la dynamite par un garde maritime qui est aussi son parrain. La scène dégénère. Pris de panique, il lui tire dessus, puis s’acharne pour s’assurer qu’il est mort. Quelques semaines plus tard, dénoncé par son propre frère, il avoue, avant de se rétracter.

En 1962, il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Il restera en prison jusqu’en 1977, soit dix-sept ans derrière les barreaux. Sa bonne conduite lui permet alors d’obtenir une libération conditionnelle. La justice croit à une seconde chance. La suite va montrer l’inverse.

De la liberté au braquage sanglant de Béziers

Libéré, Tommy Recco s’installe à Marseille et travaille comme livreur, notamment pour un magasin de combinaisons de plongée. Le 22 décembre 1979, à Béziers, trois caissières d’un supermarché Mammouth sont retrouvées exécutées d’une balle dans la nuque dans la salle des coffres. L’argent de la recette a disparu. L’enquête est longue, sans témoin direct, mais les enquêteurs finiront par relier ce triple meurtre à Recco.

Carqueiranne 1980 : une fillette, son père et un voisin

Moins d’un mois plus tard, le 18 janvier 1980, nouveau choc : à Carqueiranne, dans le Var, une fillette de 11 ans, son père et un voisin sont tués, là encore d’une balle dans la tête. Les gendarmes remontent la piste d’un certain Tommy Recco, proche de la famille. Placé en garde à vue, il reconnaît les faits avant de se rétracter.

Les expertises balistiques font le lien entre les deux scènes de crime : Béziers et Carqueiranne. Même type d’arme, même mode opératoire, même froideur. En 1983, devant la cour d’assises de Draguignan, Recco est condamné à nouveau à la perpétuité pour ces deux triples meurtres, avec une période de sûreté de dix-huit ans. 

Un détenu record entre aveux, déni et demandes de sortie

Plus de soixante ans de détention au total

Si on additionne ses deux périodes de détention, Recco aura passé environ soixante-deux ans en prison : de 1960 à 1977, puis de 1980 à sa mort en 2025. Aucun autre détenu français n’a cumulé une durée aussi longue.

Longtemps incarcéré au centre pénitentiaire de Borgo, en Haute-Corse, il devient une figure presque « historique » du système carcéral français. Pour l’administration, c’est un prisonnier très âgé mais toujours jugé dangereux. Pour certains proches de victimes, il symbolise l’idée qu’on peut réellement rester en prison toute sa vie après des crimes d’une telle gravité.

« Innocent comme le Christ » : le mantra de Recco

Fait marquant : alors qu’il a avoué avant son procès, Tommy Recco nie ensuite pendant des décennies avoir commis les deux triples meurtres. Il répète la même phrase à ses avocats, aux juges, aux journalistes :

« Je suis 100 % innocent, comme le Christ. »

Cette posture de victime de « machinations » choque les familles des morts, qui n’ont jamais entendu de regret clair ni de demande de pardon. Elle complique aussi ses demandes de libération conditionnelle, car la justice examine la reconnaissance des faits et l’évolution de la personnalité avant d’envisager une sortie.

Refus en série et bataille à Strasbourg

À partir des années 2000, les demandes de remise en liberté de Tommy Recco s’enchaînent : plus de vingt requêtes, toutes rejetées. Les juges estiment que le risque de récidive reste élevé et que son état de santé, pourtant dégradé, reste compatible avec la détention.

En 2023, il va plus loin en saisissant la Cour européenne des droits de l’homme. Son avocat dénonce une « perpétuité réelle » qui, selon lui, s’apparenterait à un traitement inhumain. L’affaire pose une question sensible : à partir de quand une peine de prison devient-elle trop longue, même pour un tueur en série ?

La fin de vie d’un tueur en série

Âgé, malade, atteint d’un cancer et de multiples pathologies, Tommy Recco est transféré en 2024 de Borgo vers le centre de détention de Salon-de-Provence, puis vers Aix-Luynes, afin d’être plus proche des structures hospitalières de Marseille. 

Le 20 novembre 2025, il meurt à l’hôpital de Marseille, à 91 ans. Officiellement, il succombe à la maladie et à son grand âge, après plus d’un demi-siècle passé dans les prisons françaises. Au moment de sa mort, il est toujours légalement condamné à perpétuité, sans avoir obtenu la liberté qu’il réclamait pour « mourir dans son lit ».

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