Des accusations liées à des contrats de conseil pour Renault
Selon les juges d’instruction, Rachida Dati aurait perçu près de 900 000 euros entre 2010 et 2012, alors qu’elle était eurodéputée et avocate, pour des prestations de conseil réalisées pour RNBV, filiale de Renault-Nissan. Le problème ? Les enquêteurs estiment qu’il n’y aurait pas de trace d’un réel travail effectué. Ils soupçonnent une activité déguisée de lobbying, ce qui est interdit aux élus européens.
Les charges retenues contre la ministre sont lourdes : corruption passive, trafic d’influence et recel d’abus de pouvoir. La convention d’honoraires qu’elle a signée pourrait, selon l’enquête, avoir masqué une influence directe au profit du groupe automobile.
Intervenant sur LCI, Rachida Dati a fermement rejeté les accusations portées contre elle. Elle a dénoncé une « procédure judiciaire émaillée d’incidents » et un « manque de respect pour les droits de la défense ».
« Je ne me résignerai pas. Ils essayent de me mettre un genou à terre, mais je ne mettrai pas le second », a-t-elle déclaré à la télévision, brandissant des documents comme preuve de sa bonne foi.
Malgré ce renvoi en correctionnelle, elle reste au gouvernement, selon une source proche de l’Élysée. À ce stade, aucune condamnation n’a été prononcée. Rachida Dati maintient qu’elle est victime d’une instrumentalisation politique à l’approche des municipales.
Carlos Ghosn, toujours au Liban, également renvoyé
L’ancien dirigeant du groupe Renault-Nissan est également visé dans cette affaire. Il est poursuivi pour corruption active, abus de confiance et abus de pouvoir. Depuis sa fuite spectaculaire du Japon en 2019, il réside au Liban et fait l’objet de plusieurs mandats d’arrêt internationaux, ce qui empêche tout retour en France pour le moment.
Renault s’est constitué partie civile dans ce dossier. Le groupe automobile espère que la justice clarifiera les contours des contrats signés sous la direction de Carlos Ghosn.
Une première audience prévue en septembre
Une première étape judiciaire est fixée au 29 septembre 2025. Elle permettra de définir le calendrier du procès, dont la date pourrait être repoussée après les élections municipales de mars 2026. Ce procès pourrait donc se dérouler en plein cœur de la campagne parisienne, où Rachida Dati est pressentie pour se présenter à la mairie.
Une procédure longue et contestée
Depuis le lancement de l’instruction en 2019, Rachida Dati a multiplié les recours pour tenter d’obtenir la prescription ou l’annulation des poursuites. Aucun n’a abouti. En juillet 2021, elle a été mise en examen après un passage sous le statut de témoin assisté. Elle affirme que l’affaire est prescrite et entend faire appel de la décision de renvoi.
Les magistrats ont estimé qu’il existait suffisamment d’éléments pour organiser un procès, malgré les contestations de la défense. Des recours sont toujours en cours, mais ils ne bloquent pas la suite de la procédure.
Un contexte politique sous tension
Depuis sa nomination surprise au ministère de la culture en 2024, Rachida Dati s’est imposée comme une figure médiatique et clivante du gouvernement Bayrou. L’Élysée, de son côté, reste discret mais affirme respecter la présomption d’innocence.
Ce dossier judiciaire pourrait peser lourd dans l’opinion publique, à la veille d’échéances électorales majeures. Le procès, s’il a lieu, mettra face à face deux personnalités très exposées, issues à la fois du monde politique et de l’industrie.
Renault, mis en cause indirectement à travers sa filiale RNBV, devra répondre de ses pratiques de l’époque. L’affaire soulève des interrogations sur le mélange des genres entre politique, conseil et influence, notamment dans le cadre européen.
Pour l’exécutif, maintenir une ministre renvoyée en correctionnelle est un pari risqué. L’affaire rappelle que les lignes entre éthique publique et intérêts privés restent floues, même au sommet de l’État.