Sanofi a décidé de vendre une partie de sa division de santé grand public, Opella, au fonds d’investissement américain Clayton, Dubilier & Rice (CD&R). Cette transaction inclut des marques emblématiques comme Doliprane, un produit de référence dans les foyers français. Le montant proposé dépasse les 15 milliards d’euros, faisant de cette vente un événement majeur pour l’industrie pharmaceutique. Le choix de Sanofi de céder cette division soulève de nombreuses interrogations, notamment sur l’avenir de la production et la disponibilité du Doliprane en France.
Le contexte de la vente d’Opella
Opella, la division santé grand public de Sanofi, regroupe plus d’une centaine de marques reconnues, telles que Dulcolax, Lysopaïne, Maalox et bien sûr Doliprane. Ce médicament, qui contient du paracétamol, est l’un des plus vendus en France, notamment en raison de son efficacité contre la douleur et la fièvre. La division Opella a généré un chiffre d’affaires de 5,2 milliards d’euros en 2023, ce qui en fait une part significative des revenus de Sanofi.
Sanofi avait commencé à explorer différentes options pour cette division en octobre 2023, y compris la possibilité d’une introduction en bourse ou d’une vente complète. C’est finalement la proposition de CD&R, avec une offre dépassant 15 milliards d’euros, qui a convaincu le géant pharmaceutique de se séparer de sa division de santé grand public.
Une décision stratégique pour Sanofi
Pour Sanofi, cette vente permet de recentrer ses priorités stratégiques. L’entreprise souhaite concentrer ses efforts sur le développement de médicaments innovants dans des secteurs plus spécialisés, tels que les vaccins et les traitements contre les maladies rares. En délaissant ses produits de santé grand public, Sanofi espère accélérer la recherche et le développement de nouvelles molécules plus lucratives, tout en améliorant sa rentabilité.
L’injection de 15 milliards d’euros dans ses finances permettra également à Sanofi de renforcer sa capacité à investir dans ces nouveaux segments. Une partie des fonds issus de cette transaction pourrait être redistribuée aux actionnaires, renforçant ainsi l’attrait de Sanofi pour les investisseurs.
L’avenir du Doliprane sous pavillon américain
L’acquisition d’Opella par un fonds américain a soulevé des préoccupations, notamment en ce qui concerne la production locale du Doliprane et la sécurité d’approvisionnement. Le Doliprane, produit dans plusieurs usines françaises, est un symbole de l’industrie pharmaceutique hexagonale. Le passage de ce médicament sous pavillon étranger suscite des craintes quant à l’avenir des emplois en France et la continuité de la fabrication sur le sol national.
Marc Ferracci, ministre délégué à l’Industrie, a réagi à l’annonce de cette vente en affirmant que le gouvernement serait vigilant sur le maintien de la production en France. Il a rappelé que la sécurité de l’approvisionnement en médicaments essentiels, tels que le Doliprane, est une priorité nationale. Bien que Sanofi et CD&R aient assuré que la production ne serait pas délocalisée, le gouvernement reste attentif aux engagements économiques et industriels pris dans le cadre de cette transaction.
Un médicament emblématique des foyers français
Le Doliprane occupe une place centrale dans la vie quotidienne des Français. Ce médicament sans ordonnance, utilisé pour soulager la douleur et la fièvre, est devenu un produit incontournable. Au fil des ans, le Doliprane s’est imposé comme un remède de référence contre des pathologies courantes comme le rhume, la grippe ou encore les maux de tête.
La dépendance des Français à ce médicament s’est particulièrement manifestée lors des pénuries observées en 2022 et 2023, lorsque les épisodes de grippe et de COVID-19 ont provoqué une explosion de la demande. La difficulté de certains à se procurer leur boîte de Doliprane a mis en lumière l’importance de garantir une autonomie sanitaire pour la production de ce type de médicament.
Une acquisition aux enjeux économiques et politiques
L’enjeu de cette acquisition dépasse largement le cadre économique. La vente d’Opella à un acteur américain soulève des questions quant à la souveraineté industrielle de la France. Sanofi, en tant que fleuron de l’industrie pharmaceutique française, a joué un rôle clé dans le développement de la filière des médicaments en vente libre. En cédant cette activité à un fonds étranger, certains redoutent une perte de contrôle sur la production et la commercialisation de ces médicaments en France.
De plus, le gouvernement suit de près cette transaction en raison de ses implications sur l’emploi. Opella emploie 11 000 salariés dans le monde, dont une part importante en France. Le maintien de ces emplois, notamment dans les usines de production de médicaments, est une préoccupation majeure pour les autorités. Si la vente permet à Sanofi de se recentrer sur ses priorités stratégiques, elle impose aussi au gouvernement de garantir la stabilité de l’emploi et la pérennité des sites de production.
Le rôle de CD&R dans le futur d’Opella
Le choix de CD&R comme acquéreur d’Opella n’est pas anodin. Ce fonds d’investissement est connu pour sa capacité à redresser des entreprises et à améliorer leur rentabilité. Cependant, il a également une réputation de réduction des coûts, ce qui fait craindre des suppressions d’emplois ou des optimisations de la production à l’étranger.
Le modèle économique de CD&R repose sur des acquisitions stratégiques dans des secteurs clés, suivies de réorganisations visant à maximiser les bénéfices. Pour Opella, cela pourrait signifier une accélération de la croissance sur certains marchés, notamment aux États-Unis, où la division a connu un ralentissement des ventes en 2023.
Sanofi restera partiellement investi dans Opella après la vente, ce qui montre que le laboratoire pharmaceutique croit encore au potentiel de cette division. L’acquisition par CD&R pourrait offrir de nouvelles perspectives de développement, en particulier sur les marchés internationaux. Le fonds américain a l’expertise nécessaire pour accompagner la croissance d’Opella, notamment aux États-Unis, où des segments comme l’hygiène personnelle et les soins de santé représentent des opportunités de marché significatives.