Ce lundi 4 novembre 2024, sept familles françaises regroupées dans le collectif Algos Victima ont assigné en justice le réseau social TikTok devant le tribunal judiciaire de Créteil. Cette démarche, qualifiée de première en Europe, vise à faire reconnaître la responsabilité de la plateforme dans l’aggravation de la santé mentale et physique de leurs enfants. Les familles accusent TikTok d’exposer les mineurs à des contenus incitant au suicide, à l’automutilation et aux troubles alimentaires.
Parmi les sept adolescentes concernées par cette affaire, deux jeunes filles de 15 ans se sont suicidées, tandis que quatre autres ont tenté de mettre fin à leurs jours. Une septième adolescente a développé des problèmes d’anorexie. Ces événements tragiques ont poussé les familles à agir collectivement pour dénoncer l’algorithme de TikTok, qu’elles jugent responsable d’avoir amplifié le mal-être de leurs enfants en leur suggérant des contenus nuisibles.
Delphine, la mère de Charlize, une des adolescentes touchées, raconte que sa fille, victime de harcèlement scolaire, a commencé à utiliser TikTok pour y trouver du réconfort. Cependant, l’algorithme de la plateforme, conçu pour proposer des contenus en fonction des préférences de l’utilisateur, a plongé Charlize dans un cercle vicieux.
L’algorithme a capté le style de ses recherches et lui a proposé d’autres contenus, de plus en plus sombres, sur la dépression et les scarifications. TikTok a amplifié son malaise, à force de l’abreuver de contenus que les ados de son âge ne devraient jamais voir.
Les témoignages des familles sont unanimes quant à l’impact de la plateforme sur leurs enfants. Jérémy, le père de Charlize, exprime son choc :
TikTok, l’image que j’en avais, c’était des vidéos de danse ou des tutos de maquillage. Jamais je n’aurais pensé qu’il pourrait y avoir des vidéos expliquant comment démonter une lame de taille-crayon pour se faire des scarifications. Cela me paraissait inconcevable
TikTok revendique un engagement en faveur de la sécurité de ses utilisateurs, déclarant dans sa charte :
Nous nous engageons à fournir aux adolescents et aux familles des outils et des ressources pour aider chacun dans son parcours de bien-être numérique.
Pourtant, les familles soulignent que la réalité est tout autre. L’application, qui compte plus de 21 millions d’utilisateurs en France, n’aurait pas suffisamment modéré les contenus potentiellement dangereux, exposant ainsi les jeunes à des vidéos préjudiciables.
L’action en justice vise à établir la responsabilité de TikTok dans la dégradation de l’état de santé de ces adolescentes. L’avocate Laure Boutron-Marmion, qui représente le collectif Algos Victima, espère que cette procédure poussera la plateforme à améliorer la modération de ses contenus et à protéger les mineurs de l’exposition à des vidéos dangereuses. Les familles déplorent également que TikTok n’avertisse pas suffisamment ses utilisateurs de l’effet addictif de l’application.
Cette action judiciaire en France n’est pas isolée. Aux États-Unis, des procédures similaires ont été engagées contre des réseaux sociaux comme TikTok, Instagram et Facebook. En octobre dernier, les procureurs de quatorze États américains ont intenté un procès contre TikTok, accusant l’application de nuire à la santé mentale des jeunes en proposant des fonctionnalités conçues pour maximiser le temps passé en ligne.