Alors que la crise économique continue de peser lourdement sur l’industrie française, le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a pris la parole ce samedi sur France Inter pour évoquer des perspectives peu rassurantes. Selon lui, des milliers d’emplois pourraient être supprimés dans les mois à venir dans des secteurs clés tels que l’automobile, la chimie et la grande distribution, des filières fragilisées par une concurrence internationale accrue et une conjoncture défavorable.
La filière automobile française est particulièrement touchée, et les annonces de suppressions d’emplois se multiplient. Les difficultés rencontrées par les grands équipementiers européens et français, tels que Michelin, Valeo et Forvia, illustrent la crise profonde qui secoue ce secteur. L’annonce récente de Michelin, concernant la fermeture de ses sites de Cholet (Maine-et-Loire) et Vannes (Morbihan), entraîne à elle seule la suppression de 1 254 postes d’ici 2026. Ce choc social a provoqué la colère des employés et des syndicats, et le ministre s’est rendu sur place pour tenter d’apaiser les tensions, mais son discours a été accueilli par des huées.
Face à cette situation critique, Marc Ferracci plaide pour une réponse coordonnée à l’échelle européenne afin de soutenir l’industrie automobile. Le ministre a évoqué la mise en place d’un “bonus écologique à l’échelle européenne” pour encourager la transition vers des véhicules plus respectueux de l’environnement. Il a également souligné la nécessité d’un “emprunt commun européen” visant à financer des mécanismes de soutien à la filière.
Ferracci précise que la Commission européenne travaille sur une législation européenne pour l’industrie propre, le Clean Industrial Act, qui pourrait permettre de lancer ces mesures dès le premier semestre 2025. « La protection commerciale vis-à-vis des véhicules chinois doit se concevoir au niveau européen », a insisté le ministre, rappelant l’importance de défendre la compétitivité de l’industrie automobile en Europe face aux importations étrangères.
Outre l’automobile, le secteur de la chimie subit lui aussi des pressions importantes, notamment en raison de la hausse des coûts de l’énergie et de la perte des approvisionnements en gaz bon marché. En France, des entreprises telles que Solvay, Syensqo et Weylchem Lamotte ont déjà annoncé des réductions d’effectifs, une tendance qui se retrouve également en Allemagne, où le secteur reste pourtant un pilier de l’économie. La crise énergétique et l’inflation fragilisent cette industrie, autrefois florissante, et la perte de compétitivité devient un problème majeur.
Ferracci avertit que les semaines à venir risquent de voir d’autres annonces de fermetures de sites dans plusieurs secteurs industriels. En plus de Michelin, Auchan a également récemment annoncé un plan social d’envergure, qui entraînera la suppression de 3 650 postes. Face à cette vague de licenciements, les syndicats appellent à une mobilisation massive et demandent une meilleure prise en charge des salariés touchés par ces restructurations.
Lors de son déplacement à Cholet, Ferracci a tenté de rassurer les salariés en promettant que “personne ne serait laissé sans solution”. Il a évoqué des indemnités dignes et des mesures de reclassement au sein des bassins d’emploi locaux. Toutefois, les syndicats restent sceptiques quant à la capacité du gouvernement à assurer une réelle sécurité de l’emploi pour ces travailleurs. Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, a fermement réagi aux propos du ministre, déclarant que « les salariés ne se battent pas pour un chèque, mais pour préserver leurs emplois ».
Le climat social tendu autour de ces fermetures a également résonné à l’Assemblée nationale, où plusieurs députés écologistes et insoumis ont appelé à la création d’une commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics dans les entreprises bénéficiant d’aides de l’État. Cette commission vise à formuler des propositions pour mieux encadrer les aides financières accordées aux entreprises, en tenant compte de leur impact sur l’emploi et de leur responsabilité sociale.
Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, a également réagi, alertant sur les défis économiques majeurs posés par la concurrence de la Chine et des États-Unis. Il a plaidé pour une politique commerciale plus stricte et un soutien renforcé aux industries nationales, notamment face à la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie.
Ferracci insiste sur l’importance de moderniser l’industrie française et européenne pour faire face aux crises actuelles. Le Clean Industrial Act, annoncé par la Commission européenne pour début 2025, pourrait offrir un cadre réglementaire plus adapté aux enjeux de l’industrie propre, permettant de mieux protéger les filières industrielles tout en soutenant la transition écologique.